Re:Zero Académie

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Traduit par : Eminent

Traduit de l’anglais par : Namba

Relu par : Akira

Artiste des fan-arts : ZeroBarto

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RE:ZERO ACADÉMIE

ChapiTRE 1 : Première heure

C’était un jour comme les autres, et comme d’habitude, mon réveil matinal arriva sans prévenir et avec fracas.

“Alleeez ! Réveille-toi. C’est le matin !”

“Buegh !” 

Réveillé en sursaut par un coup à l’estomac, une éructation s’échappa de ma bouche. Non, en fait, il serait plus juste de dire que j’ai été brutalement tiré de mon sommeil. 

L’air ayant été expulsé de mes poumons, j’avais ouvert les yeux en souffrant. Un visage mignon et adorable que je connaissais très bien se trouvait devant moi.

“Bonjour, ma sœur idiote”, dis-je.

“Bonjour effectivement, je suppose, frère idiot”, répondit-elle. Sans savoir si c’était parce qu’elle sentait l’irritation dans ma voix, elle descendit de mon ventre en même temps qu’elle parlait. “Il est temps pour toi de te réveiller. Si tu ne le fais pas, tu seras en retard à l’école, je suppose, et papa et maman se fâcheront contre toi, en fait.”

C’était une jeune fille avec un visage de poupée et des cheveux de couleur crème pâle en forme de foreuses verticales. J’avais toujours imaginé qu’elle ferait une excellente poupée décorative si elle ne parlait pas. Mais en même temps, elle était aussi très adorable lorsqu’elle interagissait avec les autres, les charmant avec son tact.

“Aussi incroyable que cela puisse paraître, c’est ma petite sœur, Natsuki Béatrice, mais le bruit court qu’elle ne ressemble en rien à son frère aîné.”

“À qui présentes-tu Betty ?” demanda Béatrice. “Tu es bizarre comme d’habitude, grand fr… Subaru.”

“Tu étais si près du but. Tu aurais dû finir ta pensée”, dis-je. “Je suis vraiment triste que tu ne m’appelles plus grand frère ces jours-ci.”

“A-arrête de dire des bêtises et lève-toi ! Si tu ne le fais pas, nous allons faire attendre ces jumelles !”

“Ça craint. Très bien, je vais me changer. Béako, aide-moi à me déshabiller, veux-tu ?”

“Fais-le toi-même !” s’exclama-t-elle, me lançant un oreiller au visage avant de quitter la pièce.

La façon dont elle se comportait, malgré l’interaction avec son frère aîné, un événement qui devrait être réconfortant, me faisait me demander si elle n’était pas en train de traverser sa phase de rébellion. Elle avait même cessé de prendre des bains avec moi. Mais le pire, c’est la façon dont elle s’adresse à moi. C’était dur de croire que lui permettre d’appeler son propre frère aîné par son nom était une bonne chose pour son éducation. J’aurais aimé que nos parents fassent quelque chose, mais ils étaient plutôt tolérants. Non, en fait, ils sont juste indifférents vis-à-vis de ce genre de choses. C’était donc à moi, en tant que grand frère, de donner le bon exemple.

“Je me suis donc changé et je suis descendu”, dis-je en descendant les escaliers après avoir enfilé mon uniforme, un cartable vide à la main. La légère odeur de pain grillé qui flottait dans l’air indiquait que le petit-déjeuner était prêt et posé sur la table.

“Bonjour !” me salua un homme d’âge mûr dès que j’ouvris la porte.

“Ouais, ouais, bonjour, bonjour”, dis-je dédaigneusement.

L’homme d’âge moyen fit la moue devant ma réponse, mécontent. “Hey, fiston, c’est quoi cette réponse froide ? Tu devrais agir un peu plus comme ma fille bien-aimée.”

“Qu’est-ce que ?” répondis-je. “Tu as joué le jeu du bonjour enthousiaste de ce vieil homme, Béako ?”

“P-parce que si Betty ne le fait pas, Papa devient vraiment triste”, expliqua-t-elle. “Betty ne veut pas voir cette famille s’effondrer à cause d’elle, je suppose.”

Elle semblait avoir été confrontée à un terrible dilemme malgré son jeune âge. Mais la camarade de classe de Béako, Pétra, utilise elle aussi des mots difficiles. Je suppose que les enfants de l’école primaire ont tendance à être précoces de nos jours. C’est un peu effrayant de voir à quelle vitesse le Japon progresse.

“Alors”, dis-je en m’étirant le cou en m’asseyant, “qu’y a-t-il pour le petit-déjeuner aujourd’hui ?”

“C’est évident, non ?” répondit Maman en apportant les toasts sur la table. “Toasts à la mayonnaise, soupe à la mayonnaise, salade à la mayonnaise et poisson mijoté à la mayonnaise.”

Le petit-déjeuner de notre famille avait un menu fixe. Et même si chaque plat pouvait être classé comme étant de style japonais ou de style occidental, ils avaient tous un ingrédient en commun : la mayonnaise.

“Si tu veux utiliser ta propre mayonnaise, sors-la toi-même du réfrigérateur”, dit Maman. “Ajoute de la mayonnaise s’il n’y en a pas assez.”

“Oui, m’dame”, répondis-je. “Mais c’est vraiment bizarre quand on y pense. Existe-t-il d’autres foyers où chaque membre de la famille a sa propre mayonnaise ?”

“À l’époque où Betty pensait que c’était normal, Pétra se moquait d’elle quand elle lui en parlait… Betty est encore traumatisée par cette expérience, je suppose.”

Tout en compatissant avec ma petite sœur morose, je sortis de la mayonnaise du réfrigérateur. Ma famille était composée de fanatiques de la mayonnaise qui avaient même leur propre mayonnaise. J’en faisais partie, bien sûr. Béako ne faisait pas exception à la règle.

C’était toujours ainsi que commençaient les matinées de la famille Natsuki. Nous étions une famille de quatre personnes. Même s’il y avait un problème avec ma petite sœur qui traversait sa phase de rébellion, il était possible de dire que nous vivions paisiblement dans notre vie heureuse et banale.

Alors que je savourais mon toast à la mayonnaise, qui n’était autre que du pain ordinaire grillé après avoir été tartiné de mayo, on sonna à la porte.

“Hm ?” dis-je, avant de reporter mon attention sur l’horloge. Il était déjà temps pour moi de me mettre en route. “Merde, j’ai pris trop de temps ce matin.”

J’avais enfourné le reste du toast à la mayonnaise dans ma bouche et l’avais arrosé d’un peu de soupe à la mayonnaise. Alors que je me levais, portant mon sac sur l’épaule, Béako se leva également de son siège avec son sac randoseru.

(Note de Traduction : Un randoseru est, au Japon, un sac à dos rigide utilisé par la plupart des élèves d’école élémentaire. Plus d’informations ici.)

“…Pourquoi fixes-tu Betty comme ça, je suppose ?” demanda Béatrice, remarquant mon regard.

“Non, c’est juste que tu es très belle avec un sac randoseru, comme d’habitude”, répondis-je. “S’il y avait un prix pour le meilleur porteur de sac randoseru, tu le gagnerais.”

“C-ce n’est pas un compliment !”

Tandis que je tapotais la tête de Béako qui rougissait, nous nous dirigeâmes vers la porte. Remarquant que papa et maman avaient commencé à flirter derrière nous, nous fîmes nos adieux à voix basse et quittâmes précipitamment la pièce.

“Bonjour, Subaru”, une jeune fille aux cheveux bleus descendant jusqu’au cou me salua après que j’eus mis mes chaussures et franchi la porte d’entrée. C’était Rem.

Comme d’habitude, le sourire de Rem était comme une fleur en pleine éclosion, et sa voix était pleine de vivacité. En fait, elle est si belle que, même si nous ne sommes que des amis d’enfance, j’ai peur que quelqu’un me poignarde parce qu’elle vient me voir tous les matins avant l’école. Malgré cette crainte, je n’avais pas l’intention d’abandonner cette routine.

“Quelque chose ne va pas ?” demanda Rem. “Pourquoi fixes-tu le visage de Rem comme ça ?”

“Nan, ce n’est rien”, dis-je, incapable d’avouer que j’étais subjugué par sa beauté. “Bonjour.”

“Oui, bonjour !”, répondit-elle sans se préoccuper de mon comportement étrange.

Depuis que nous étions enfants, elle n’avait jamais été du genre intrusif. C’était l’une des qualités que j’aimais chez elle.

“Bonjour à toi aussi, Béatrice”, déclara Rem en reportant son attention sur elle.

“Bonjour, en fait”, répondit-elle. “Tu es vraiment dévouée, je suppose, tu viens jusqu’ici juste pour Subaru tous les matins. Je te jure, tu as des goûts vraiment étranges par rapport à ta grande sœur.”

“Cela ne veut-il pas dire que tu as aussi des goûts étranges, Béatrice ?” demanda Rem.

“Pourquoi cela signifierait que Betty a des goûts étranges ?!”

J’observais Rem taquiner Béako du coin de l’œil. Tout comme elle était mon amie d’enfance, Rem était une amie de longue date de Béako. Elle était comme sa grande sœur. Et elle adorait Béako comme une vraie sœur, mais Béako refusait de l’accepter. C’est peut-être aussi lié à sa phase de rébellion. J’aimerais qu’elle grandisse.

“En parlant de petites sœurs”, dis-je. “Où est ta grande sœur aujourd’hui ?”

“Elle est chez Roswaal ce matin”, répondit Rem. “Il sort pour une interview aujourd’hui, alors il lui a demandé de nettoyer sa maison pendant son absence.”

“Elle est toujours aussi diligente”, dis-je. “Bien que j’aie des sentiments mitigés à propos de toute cette affaire en tant qu’ami proche de Ram.”

La fille dont nous parlions, Ram, était la grande sœur jumelle de Rem. Contrairement à Rem, qui était douce et gracieuse, Ram était plutôt stricte et rude avec les autres. Bien qu’elles soient identiques en apparence, leurs personnalités ne pourraient pas être plus différentes.

Apparemment, Ram avait été charmée par un écrivain célèbre et avait tenté de l’approcher de manière agressive. D’après l’histoire de Rem, il semblerait qu’elle ait déjà la clé de sa maison. Mais ce n’est vraiment pas le genre de choses que je veux savoir sur ma camarade de classe. Rem me fixa, la tête penchée. Je ne savais pas si elle était indifférente vis-à-vis de la situation ou simplement inconsciente, mais je décidai tout de même de laisser tomber le sujet.

“Hey, qu’est-ce que vous faites tous les deux à bavarder devant la maison, en fait”, dit Béako. “Nous ferions mieux d’y aller, je suppose.”

“Oh, bien reçu”, répondis-je. “Allez, allons-y.”

“Oui”, dit Rem. “Partons.”

Jetant mon sac sur mon épaule, nous nous mîmes à marcher. Béatrice était au milieu, moi le long de la route et Rem de l’autre côté. C’était ainsi que nous allions à l’école quand Ram n’était pas avec nous.

“Au fait”, commença Rem, “ton horoscope a été le plus chanceux aujourd’hui, Subaru.”

“Sérieusement ?” dis-je. “Il pourrait donc se passer quelque chose de bien aujourd’hui, hein ? Je ne le savais pas du tout puisqu’on ne regarde pas la télévision le matin chez nous.”

“Il est dit que tu vas rencontrer quelqu’un de génial aujourd’hui”, poursuivit Rem. “Ça dit que la première fille que tu rencontreras aujourd’hui sera ton âme sœur.”

“Betty est la première fille que Subaru a rencontrée aujourd’hui, en fait.”

“Erreur de Rem. La troisième fille que tu rencontreras aujourd’hui sera ton âme sœur.”

“L’horoscope était aussi précis ?!” m’exclamai-je.

Qui était la troisième fille, déjà ? Est-ce que ma mère compte ? Si ce n’est pas le cas, alors Rem serait la troisième fille que j’ai rencontrée aujourd’hui. Mais ne serait-ce pas bizarre de dire que j’ai “rencontré” Rem aujourd’hui alors que je la connais depuis longtemps ? Je ne sais toujours pas si je dois ajouter ma sœur et ma mère à cette liste.

Alors que j’inclinais la tête en signe de réflexion, la voix d’une jeune fille nous stoppa net dans notre élan. “Oh, quel timing parfait pour tomber sur vous ici.”

C’était une belle femme à la peau pâle et aux cheveux blancs, entièrement vêtue de noir comme si elle se rendait à un enterrement.

Remarquant qu’il s’agissait d’une fille que je connaissais bien, je la saluais. “Hey, bonjour, Echidna.”

Echidna était étudiante à l’université et l’aînée… Ou était-ce la troisième ? En bref, une fille de la famille suspecte qui possédait le manoir devant lequel nous passions tous les jours sur le chemin de l’école.

“Qu’entends-tu par “timing parfait” ?” demandai-je. “Il s’est passé quelque chose ?”

“Oui, il s’est passé quelque chose”, répondit Echidna. “Ou devrais-je dire qu’il y a eu une disparition ? Vous vous souvenez tous les trois de ma sœur dépravée, pas vrai ? Eh bien, elle semble s’être volatilisée quelque part. J’ai peur qu’elle se soit effondrée au milieu de la route, quelque part, alors qu’elle se promenait, et je suis donc parti à sa recherche. Vous ne l’auriez pas vue, par hasard ?”

“Tu veux dire Sekhmet ?” demanda Rem d’un ton rhétorique. “Non, Rem ne l’a pas vue. Toi non plus, pas vrai, Subaru ?”

“Je ne l’ai pas vue non plus aujourd’hui”, répondis-je. “Si je me souviens bien, la dernière fois qu’elle a disparu, elle est allée sortir les poubelles et s’est endormie à côté de la benne à ordures, pas vrai ? L’éboueur a dit que c’était un régal pour les yeux.”

La sœur aînée d’Echidna, Sekmet, était également belle mais tristement célèbre pour sa paresse. On la voyait souvent se promener dans des vêtements aussi révélateurs que des sous-vêtements, ce dont je me réjouissais toujours en tant que membre du sexe opposé dans la même tranche d’âge. En même temps, elle ressemblait plus à une personne qui avait besoin d’aide et de soins qu’à une simple dame séduisante, ce qui était une grande déception.

“Bon, ceci mis à part”, dis-je en posant ma main sur ma mâchoire et en fixant Echidna intensément.

“Hm ? Qu’y a-t-il ? Pourquoi me regardes-tu comme ça ?” Echidna réagit à mon regard.

Elle était belle. Si je ne compte pas ma mère dans l’équation, ça signifie qu’Echidna est la troisième fille que je rencontre aujourd’hui. Pourrait-elle être mon âme sœur ?

“Tu vas me faire rougir si tu continues à me dévisager comme ça”, dit-elle. “Je suis tout de même une fille, après tout. D’ailleurs, je suis sortie de la maison uniquement pour chercher ma sœur, alors je ne me suis pas maquillée.”

“Elle a raison, ce n’est pas très galant, Subaru”, acquiesça Rem en m’attrapant le bras. “Tu es en train de troubler Echidna. Tu dois te calmer et reconsidérer l’identité de la troisième fille. C’était Rem.”

“Tes désirs débordent, je suppose”, dit Béatrice en m’attrapant l’autre bras. “Mais Betty est d’accord pour dire que cette femme n’est pas bonne, en fait.”

“Qu’est-ce qui vous arrive à toutes les deux ?!”

Malgré l’apparente plaisanterie d’Echidna, les deux filles qui m’attrapaient les bras de part et d’autre avaient l’air très sérieuses. Je te jure, les filles adorent ces stupides prédictions divinatoires.

“Echidna !” appela une autre voix. “Grande sœur n’était pas à la benne à ordures !” Une loli blonde aux yeux bleus et aux seins géants courut vers nous en criant. C’était la deuxième plus âgée des frères et sœurs d’Echidna.

(Note de Traduction : À l’origine, dans le Web Novel, Minerva était une loli. Cet élément a été modifié dans le Light Novel.)

“Hey, Minerva”, dis-je en l’appelant par son nom.

“Hm ?! Oh, ne serait-ce pas Rem, Béatrice et Natsuki !” répondit Minerva en s’arrêtant et en affichant un sourire radieux. “Que faites-vous tous les trois ici ?”

Elle était toujours aussi belle. Instinctivement, je lui pris les mains et lui dis : “Sans compter ma mère et ma sœur, tu es la troisième. Autrement dit, tu es mon âme sœur, Minerva !”

“Quo—?!”

Tandis que je m’agrippais à ses mains douces, Minerva faisait des allers-retours entre ses mains et mon visage. Son visage se mit rapidement à rougir, jusqu’à devenir complètement rouge.

“M-mais je ne peux faire que des tâches ménagères”, dit-elle en tremblant.

“J’y pourvoirai”, répondis-je.

“J-je suis aussi très maladroite !”

“J’aime aussi cette partie de toi.”

“J-je dois aussi me battre pour la paix dans le monde !”

“Tu es tout mon monde.”

Avec un visage aussi rouge qu’une pieuvre bouillie, Minerva poussa un cri et se mit à piétiner sur place. Bon sang, elle est vraiment mignonne. Je l’ai peut-être trop taquinée. Le fait qu’il semblait possible de faire d’elle ma femme à ce moment précis était plutôt effrayant. Je me demande si quelqu’un a déjà essayé de la séduire, vu comme elle est mignonne.

“Calme-toi Minerva”, dit Echidna. “Ce n’est qu’une des manigances habituelles de Natsuki.”

“Hein ? Vraiment ?”

“Eh bien”, commençai-je, “Je ne peux pas admettre que je me moquais de toi, puisque ça me rendrait infâme, donc la réponse est non, je suis très séri… ow, ow, ow, Rem, ton talon s’enfonce dans mes orteils.” Rem me marchait sur les pieds en souriant. Je n’avais pas d’autre choix que de céder.

Minerva plaça ses mains sur sa poitrine géante et poussa un gros soupir. “B-bien sûr. Oh, tu m’as fait peur. J’étais tellement surprise que mes seins auraient pu rétrécir un peu.”

“Ce serait une perte pour l’humanité !” m’exclamai-je en tremblant, ce qui me valut un coup de poing de la part de Minerva.

“Tais-toi ! Espèce d’idiot !”

Malgré le fait d’avoir été frappé assez durement, cela m’avait fait du bien. Tellement étrange.

“Quoi qu’il en soit, nous n’avons pas vu votre sœur, je suppose. C’est la fin de l’histoire, en fait.”

“Oh, tu parais amer”, dit Echidna. “Tu es fâchée que ton frère nous accorde toute son attention ?”

“Ce n’est pas ça !” s’exclama Béatrice en gonflant ses joues. “Betty déteste vraiment ça, en fait !”

Elle a l’air vraiment en colère. Elle doit vraiment détester que nous perdions notre temps sur le chemin de l’école. Cependant, comme elle l’avait souligné, il était évident que nous ne serions d’aucune aide pour Echidna et Minerva. Et l’école commençait bientôt, il était donc temps de prendre congé.

“Désolé de n’avoir pu vous aider”, dis-je avant de partir.

“Non, vous devez donner la priorité à vos études”, répondit Echidna. “En outre, c’est le problème de notre famille.”

“Tu parles comme une vieille dame, je suppose “, lança Béatrice.

“Bien sûr que je te parais vieille, puisque je suis une étudiante qui a beaucoup de temps libre, alors que tu n’es qu’une enfant.”

“J’aide aux tâches ménagères actuellement, alors j’ai aussi beaucoup de temps libre !” s’exclama Minerva.

“Tu aides rarement, pourtant ?” lança Echidna.

“Il en va de même pour la sœur de Rem”, ajouta cette dernière.

“Je pense que son manque d’utilité est incomparable”, commentai-je.

C’était une façon maladroite de terminer notre interaction, mais nous nous séparâmes après leur avoir promis que nous les appellerions si nous voyions Sekhmet. Observer Minerva courir au loin et Echidna s’éloigner lentement m’amena à me demander s’il y avait vraiment un lien de parenté entre elles. Je suppose qu’elles ont en commun d’être toutes les deux très jolies.

“Subaru, Subaru”, m’appela Rem.

“Oui, Rem, qu’y a-t-il ?”

“Rem vient de se rappeler. L’horoscope de ce matin indiquait que le nom de ton âme sœur commençait par R et se terminait par M, et qu’il y avait trois lettres en tout.”

“C’était aussi précis que ça ?!”

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Alors que nous marchions tranquillement après nous être séparés d’Echidna et Minerva, nous arrivâmes à une bifurcation, séparant notre école et l’école élémentaire de Béatrice. C’est là que Rem et moi allons dire au revoir à Béako.

“Ah, Béatrice !” une fille aux cheveux auburn et aux grands yeux mignons, qui nous attendait à la bifurcation, appela le nom de Béatrice.

“Si ce n’est pas Pétra, je suppose”, dit Béatrice en répondant à sa camarade de classe.

“Bonjour, Subaru, Rem”, nous salua Pétra en s’inclinant devant nous. Quelle jeune fille bien élevée.

En termes d’attractivité, ma petite sœur était sur un pied d’égalité, mais Pétra était plus charmante. Eh bien, Béako pouvait aussi être charmante, une fois qu’on la connaissait.

“Quoi ?” demanda-t-elle. “S’il y a quelque chose que tu veux dire, dis-le franchement, je suppose.”

“Je suis le seul à connaître tes qualités”, dis-je.

“Qu’entends-tu par “le seul” ?!”, s’exclama-t-elle. “Betty ne les cache pas ! En fait, elle en a tellement qu’elle en a perdu le compte !”

Je lui tapotai la tête en disant “J’ai compris, j’ai compris”, tandis qu’elle continuait à crier alors que j’agitais ses cheveux bouclés à la verticale. Pour une raison ou une autre, cela la rendit encore plus furieuse. Je te jure, les filles de son âge sont si difficiles à comprendre.

“Ne t’inquiète pas, Subaru”, intervint Pétra, “Je connais également beaucoup de qualités de Béatrice.”

“Je vois, c’est rassurant”, dis-je. “Prends bien soin de Béako à l’école aussi, d’accord ?”

“Oui, bien sûr ! Et… Qu’en est-il de mes qualités ? Tu les reconnais aussi ?”

“Une évidente serait que tu es une fille exceptionnellement gentille, Pétra”, répondis-je. “Tu es aussi respectueuse, douce, amie avec Béako, et par-dessus tout, une jolie jeune fille qui deviendra sûrement un jour une belle dame.”

Pétra sourit et offrit sa tête pour être tapotée, ce que je fis. Je ne devrais pas caresser la fille de quelqu’un d’autre à notre époque, mais elle a ce pouvoir qui m’empêche de dire non. Maintenant que j’y pense, ne m’oblige-t-elle pas à la caresser chaque fois que nous nous rencontrons ? Non, je dois trop réfléchir.

“Mmmm”, grogna Rem.

“Bouh, je suppose”, hua Béatrice.

“Et qu’est-ce qui vous fait bouder toutes les deux ?” demandai-je.

“Rien”, dit Rem en détournant le visage.

“Tu n’as pas besoin de savoir”, répondit Béatrice en regardant de l’autre côté.

Je ne pouvais rien faire de plus. Je comprenais que lorsqu’une fille disait qu’il n’y avait pas de problème, il y avait absolument quelque chose qui n’allait pas. Cependant, dans ce cas précis, je n’arrivais pas à mettre le doigt sur ce que c’était.

“Pétra, penses-tu savoir pourquoi elles boudent ?” demandai-je.

“Je ne sais pas”, dit-elle. “Je ne suis qu’une enfant.”

C’est vrai.

Elle se déroba alors de sous ma main et, prenant celle de Béako qui faisait encore la moue, s’inclina devant moi et Rem. “Nous y allons maintenant. Typhon est la cheffe de classe aujourd’hui. Si nous ne nous dépêchons pas d’y aller, la classe va être en désordre.”

“Tu insinues qu’elle va mettre le bazar dans la classe ?!” m’exclamai-je.

“C’est la manie de Typhon, je suppose. Nous partons maintenant, en fait !” dit Béatrice, tandis que Pétra la tirait au loin.

Rem et moi saluâmes les deux élèves de l’école primaire qui partaient en courant.

“Bon, allons-y nous aussi”, dis-je.

“Reconnais-tu aussi les qualités de Rem, Subaru ?”

“Tu es mignonne.”

“Ne crois pas qu’en disant ça, tu seras tiré d’affaire à chaque fois”, répondit-elle d’un ton enjoué.

Je suppose que je suis tiré d’affaire alors. Peut-être aurais-je dû réfléchir davantage à ma réplique, mais j’étais devenu complètement dépendant de cette réponse, car elle fonctionnait toujours depuis que nous étions petits.

Alors que je tirais Rem, qui regardait vers le bas, une autre voix s’adressa à nous.

“Tu gâtes encore Rem, Cap’taine ?”

“Ahh, ne t’ai-je pas dit de rester en arrière et de regarder, Gaf-Gaf ?”

Lorsque je me retournai pour voir de qui il s’agissait, deux silhouettes émergèrent de derrière le poteau électrique au milieu de l’embranchement de la route. L’un d’eux portait un gakuran, tandis que l’autre portait un uniforme de marin. Je les reconnus immédiatement, car ils étaient tous deux des connaissances proches.

“Garfiel et Daphné, que font ici deux collégiens ?”

“Qui se soucie de s’que nous faisons ou de l’endroit où nous nous trouvons”, répondit Garfiel d’un ton condescendant. “J’ramène le sujet à toi, Cap’taine, tu brises trop d’cœurs ici, comme d’habitude. Pas vrai, Daphné ?”

“Gaf-Gaf attendait Ram-Ram ici, comme d’habitude”, dit Daphné en vendant la mèche. “Daphné ne voulait pas aller chercher Met-Met, alors elle a décidé de jouer avec Gaf-Gaf.”

“Daphné, espèce de !” s’indigna Garfiel.

Voyant son sourire condescendant s’estomper, c’était à mon tour de me moquer de lui. “Heh, je vois, alors c’est donc ça”, dis-je. “C’est donc toi qui fais son truc habituel, hein ? Il faut que je sache, vas-tu un jour abandonner ? Ram est folle amoureuse d’un romancier.”

“C-c’est l’affaire d’mon incroyabl’ personne !” s’exclama Garfiel. “D’ailleurs, si j’deviens romancier, mon incroyabl’ personne sera sur un pied d’égalité !”

“J’admire ta conviction à déterminer ton avenir pour la fille que tu aimes, mais…”

J’hésitais à poursuivre ma réflexion. D’abord, il était difficile d’imaginer que Garfiel puisse devenir romancier avec son niveau d’intelligence. Et deuxièmement, Ram n’était pas le genre de fille à tomber amoureuse de quelqu’un en fonction de son métier.

“Eh bien, tout d’abord, avec ton niveau d’intelligence, Gaf-Gaf, tu ne pourras jamais devenir romancier. Et puis, Ram-Ram n’est pas amoureuse de tous les romanciers du monde.”

“Merci de lui dire franchement ce que j’hésitais trop à dire.”

Aussi abasourdi que je fusse par le fait que Daphné dise tout ce que j’avais décidé de ne pas exprimer par considération, c’était bien mieux que ce que devait ressentir Garfiel, qui s’était effondré à genoux. Toutefois, Garfiel était un homme d’une grande dignité. Malgré son esprit malmené, il n’était pas prêt à jeter l’éponge.

“Tu vas bien, Garfiel ?” demandai-je. “Tes blessures ne sont pas si profondes.”

“Heh, merci Cap’taine”, répondit-il, “Mais j’perdrai pas face à que’que chose comme ça… En parlant d’ça, Ram est pas avec vous aujourd’hui ?”

“Elle est chez Roswaal ce matin”, répondit Rem, “Il lui a été demandé de s’occuper de sa maison pendant son absence et elle est allée chercher un double des clés.”

“Guhah !” s’exaspéra Garfiel, s’effondrant sur place après avoir entendu les paroles non mal intentionnées de Rem.

“G-Garfiel !” m’écriai-je.

Même moi, j’étais mal à l’aise d’entendre à quel point l’engouement de Ram était profond. Cela avait dû être un coup dur pour Garfiel, qui avait des sentiments pour elle, d’apprendre qu’elle recevait un double des clés de la maison d’un autre homme. Je ne trouvais rien à dire pour qu’il se sente mieux.

“Eh bien, malgré tous ses défauts, c’est ce qui fait de Gaf-Gaf ce qu’il est”, dit Daphné, affichant un sourire séduisant qui n’était pas naturel pour une collégienne, tout en s’agrippant aux pieds de Garfiel. “Vous pouvez partir tous les deux. Daphné s’occupera du reste à partir d’ici.”

Craignant qu’elle ne commence à traîner Garfiel par les pieds, je tendis la main pour l’arrêter. Cependant…

“Ne t’inquiète pas”, dit-elle, “Gaf-Gaf est douillet, alors le ménager ne fera que l’affaiblir. De pluuuus, une fois que nous serons à l’école, il y aura des personnes comme Mimi, qui lui donneront de l’attention. Il vaut mieux le remettre à sa place quand on le peut.”

“V-vraiment ?” demandai-je avec hésitation.

“Oui, c’est vrai”, répondit-elle, souriant légèrement en inclinant la tête. “Bon, alors, à bientôt.”

Et c’est ainsi qu’elle commença à entraîner Garfiel au loin. À ce stade, l’arrêter aurait été hors de question. Les collégiens ont leur propre façon de gérer les choses, et ce n’est pas à nous de nous en mêler. “C’est du moins ce que je me dis. Je ne veux pas en savoir plus sur leurs affaires.”

“Faire en sorte qu’un jeune collégien aussi innocent tombe amoureux d’elle… Nee-sama est vraiment incroyable !”

“Je ne peux pas être d’accord avec ce commentaire !”

Oh, j’ai oublié de le mentionner, mais Daphné est la cinquième fille des sœurs, alors que Sekhmet est l’aînée. Juste pour que vous le sachiez. Cette matinée a été très animée, hein.

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Après avoir quitté le duo de collégiens, Rem et moi arrivâmes à notre école, le lycée Lugnica.

Le lycée Lugnica était une école qui conservait ses traditions désuètes. Cependant, ces dernières années, il s’était efforcé de se moderniser et, de ce fait, était devenu un lieu diversifié, abritant une variété de valeurs différentes. Bien que j’aie choisi cet établissement simplement parce qu’il était proche de chez moi, j’appréciais décemment son style plutôt progressiste.

“Ah, Subaru, ils sont en train d’inspecter les sacs”, m’informa Rem, qui avait remarqué l’inspection qui se déroulait au portail de l’école avant moi, grâce à sa vue supérieure.

“Ce doit être le conseil des élèves. Ils travaillent vraiment dur dès les premières heures du matin.”

Alors que nous nous rapprochions du portail, je vis finalement l’inspection. Le lycée Lugnica organisait de temps à autre des événements tels que l’inspection des sacs ou l’assemblée du matin. Tout avait commencé lorsque l’actuel conseil des élèves avait été mis en place. Au centre de ce conseil des élèves se trouvait la présidente, une femme d’élite, qui supervisait l’inspection des sacs de cette matinée.

“Bonjour, Natsuki Subaru et Rem”, dit la présidente du conseil des élèves.

“Bonjour Madame la présidente du conseil des élèves.”

“Bonjour, Crusch”, salua Rem.

Crusch Karsten, la présidente du conseil des élèves, se tenait debout, les épaules carrées, vêtue d’un blazer bleu marine impeccablement entretenu. Ses longs cheveux verts caractéristiques et son allure digne donnaient un air de virilité malgré son sexe. Cependant, ses courbes laissaient transparaître sa féminité, il serait donc plus juste de dire qu’elle dégageait une aura guerrière.

“Comme vous pouvez le voir, nous procédons à une inspection des sacs ce matin”, déclara Crusch. “Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir coopérer.”

“Ouais, tu peux regarder autant que tu veux”, répondis-je en lui tendant mon sac. “Il est vide, de toute façon.”

“Bien que tu ne doives pas en être fier, il semblerait que tu m’aies surpassé cette fois-ci”, répondit-elle en secouant la tête tout en confirmant que mon sac était vide. “Comme c’est intéressant”, continua-t-elle en souriant comme une héroïne de film hollywoodien.

“Je n’essayais pas de te défier.”

“Très bien”, dit joyeusement une autre personne soudainement apparue sur le côté. “Moi, Ferris, je vais vérifier le sac de Rem !”

Il s’agissait de Félix, le bras droit de Crusch.

Paré d’un bandeau en forme d’oreille de chat comme à son habitude, Félix commença à inspecter le sac de Rem tandis que sa jupe audacieusement courte flottait au vent. L’idée qu’une fille devrait inspecter les affaires d’une autre fille devient inutile avec Ferris, pensai-je, puisqu’il s’agissait en fait d’un homme.

“Je comprends qu’il soit beau dans des vêtements de fille, mais personne ne se plaint qu’un homme inspecte les affaires d’une fille ?” demandai-je.

“Ça ne pose pas de problème”, répondit Crusch. “Tout le monde est conscient de la féminité supérieure à la moyenne de Ferris. D’ailleurs, le nombre d’hommes qui demandent à ce que leur sac soit inspecté par moi et de filles qui le demandent à Ferris est à peu près le même.”

“Les filles sont peut-être différentes, mais certains mecs prennent leur pied avec ça… Attends, je suis différent, quand même ! Ne me mets pas dans la même catégorie que ces types-là !” Soudain, je devins inquiet de la façon dont les gens me percevaient pour avoir naturellement tendu mon sac à Crusch afin qu’elle l’inspecte. Pendant ce temps, Félix continuait d’inspecter les affaires de Rem.

“Hein ? Pourquoi as-tu une boîte à crayons pour les garçons ?”, demanda-t-il.

“C’est pour Subaru, au cas où il aurait oublié le sien”, répondit Rem.

“Qu’en est-il de ce banal carnet de notes sans rien de mignon ?”

“C’est pour les devoirs que Rem fait pour Subaru en imitant son écriture.”

“Hmm, alors qu’en est-il de ce panier-repas ?”

“Rem a préparé ça pour Subaru au cas où il ne pourrait rien acheter à l’épicerie.”

“Très bien, punissons Subaru”, conclut Félix.

“C’est quoi ce bordel ?!” m’exclamai-je.

Je veux dire, je comprends. Vraiment. Mais quand même !

Suite à la condamnation de Félix, je me penchai vers Rem. “Rem, ne te dis-je pas toujours que tu n’as pas besoin d’en faire autant pour moi ?”

“Désolée”, dit-elle. “Rem en est douloureusement consciente. Mais chaque fois qu’elle t’imagine en train de pleurer pour quelque chose, c’est plus fort qu’elle. Elle commence à se préparer à tous les scénarios possibles.”

“J’apprécie, mais je ne pleurerai pas parce que j’ai oublié ma mine de crayon, que je n’ai pas fait mes devoirs ou que je n’ai pas mangé à midi !”

Bien que je n’aie jamais pleuré pour des raisons aussi insignifiantes auparavant, Rem semblait toujours me considérer comme un enfant. À un moment donné, il y avait eu une rumeur dans notre classe selon laquelle Rem était ma gouvernante, mais cela commençait à devenir vrai.

“Tu parles d’un amour de jeunesse”, commenta Félix. “Ai-je raison ou ai-je raison, Dame Crusch ?”

“Je suis d’accord”, acquiesça Crusch. “Ferris et moi nous préparons également des déjeuners l’un pour l’autre. Il n’y a pas de quoi être gêné, mais si tu ne veux pas être le seul à prendre soin de toi, tu devrais exprimer ta gratitude de temps en temps.”

“J’ai préparé ton omelette favorite aujourd’hui, Dame Crusch”, dit Félix. “Le genre sucré.”

“J’ai également préparé ton omelette favorite aujourd’hui”, répondit Crusch. “Le genre salé.”

Ignorant la présidente du conseil des élèves et son vice-président, je pris le panier-repas que Rem avait préparé pour moi. Enveloppé dans un tissu bleu, il était deux fois plus grand que le propre panier-repas de Rem et assez lourd.

“Bon sang, qu’est-ce que tu allais faire de ça si je ne le mangeais pas ?”

“Rem a pensé qu’elle et sa sœur pourraient l’avoir pour le dîner.”

“C’est vraiment triste, ne fais pas ça. Dis-le moi juste la prochaine fois. Je mangerai ça au déjeuner aujourd’hui, merci. Pourrais-tu aussi me montrer les réponses aux devoirs ?”

“Oui, Rem attend avec impatience le déjeuner.”

Après avoir mis le panier-repas dans le sac que l’on venait de me rendre, nous nous dirigeâmes vers le bâtiment de l’école. C’est alors que nous remarquâmes un remue-ménage sur le côté, là où ils procédaient également à l’inspection des sacs.

“Comme je l’ai dit ! Pourquoi es-tu comme ça ?! Pourrais-tu ne pas me faire répéter ? Je ne dis rien de difficile, non ?”

“Je ne crois pas non plus dire quelque chose de difficile à comprendre. C’est toi qui refuses d’écouter mes bons conseils et qui provoques une esclandre. Tu es l’exemple même de l’ignorante.”

“Tu crois que le fait d’utiliser de grands mots te donne l’air respectable ? C’est juste embarrassant. Tu es déjà au lycée, pourquoi tu ne grandis pas ? C’est gênant.”

“Ne t’avise pas de critiquer ma façon de parler alors que tu n’arrives même pas à cacher la vulgarité dans ton discours. Je suis peut-être indulgente, mais j’ai aussi mes limites.”

L’atmosphère autour du portail d’entrée devenait tendue en raison de la discussion animée entre les deux étudiantes aux apparences distinctes.

L’une des lycéennes était une belle jeune fille aux cheveux violets et au physique prépubère que l’on pourrait confondre avec celui d’une collégienne. La fille avec laquelle elle se disputait, en revanche, était également une belle jeune fille, qui avait le corps d’une femme mûre et des cheveux orange qui dégageaient un charme séduisant.

La fille qui parlait avec un accent était Anastasia, du conseil des élèves, et la fille qui parlait avec une langue vernaculaire sophistiquée était Priscilla, la trouble-fête de l’école. Elles s’affrontaient souvent en tant que comptable du conseil des élèves et petite-fille du président du conseil d’administration de l’école.

“Elles recommencent”, dit Rem en soupirant devant ce spectacle habituel.

Leur relation conflictuelle était célèbre dans toute l’école. La relation entre Priscilla, qui ne faisait de courbettes à personne, et Anastasia, qui ne reculait jamais devant un conflit, était comme l’huile et le feu. D’après ce que j’avais vu, je soupçonnais qu’elles se disputaient à propos de l’uniforme porté par Priscilla, qu’elle avait manifestement personnalisé selon ses propres préférences. Eh bien, Priscilla n’est pas disposée à suivre les règles de l’école, y compris celles concernant les uniformes. On peut dire que c’est une victoire qu’elle porte l’uniforme, même s’il a été modifié en tous points.

“Mais je parie qu’elle est la seule à pouvoir mettre dans tous ses états cette comptable avide d’argent”, commentais-je en observant de loin l’agitation qui régnait.

C’est alors qu’une voix s’abattit soudain sur moi, par-derrière. “J’apprécierais que tu t’abstiennes de désigner Ana par un surnom aussi calomnieux.”

“Geh”, m’exaspérai-je, sentant la chair de poule apparaître à cause de cette voix condescendante.

En me retournant, j’aperçus un bel homme, un salaud de gentilhomme, qui me dominait de toute sa hauteur. Il était aussi membre du conseil des élèves.

“Quoi d’neuf Julius, mon aîné”, saluai-je l’homme.

“Je ne sais pas pourquoi tu m’appelles ainsi alors que nous sommes dans la même classe”, répondit Julius en repoussant sa frange. “Mais ceci mis à part, je te prie de retirer la remarque que tu as faite tout à l’heure à propos d’Ana. Elle n’est qu’un peu obsédée par les affaires monétaires et aime trop son travail.”

“Je pense que cette opinion est un peu plus que biaisée.”

Julius était en quelque sorte le secrétaire du conseil des élèves. Comme l’indiquait sa rhétorique, il était un fidèle partisan d’Anastasia, et les deux étaient souvent vus ensemble.

“Tu n’as pas un travail à faire ? Je dirai à Crusch que tu te relâches.”

“En fait, j’ai terminé mon travail”, dit Julius en exhibant ses dents blanches. “Bien que j’aie eu beaucoup de travail avec toutes ces filles qui voulaient faire inspecter leur sac, elles se sont montrées très coopératives, ce qui m’a grandement facilité la tâche.”

“Ouais, ouais, peu importe, mec”, dis-je en scrutant.

Pourquoi les filles ne voient-elles pas l’imposture de ce type ? m’étais-je dit, avant de me rappeler qu’il n’y avait pas que les filles qui étaient amoureuses de Julius. Les hommes aussi parlent de lui en termes élogieux. Je dois donc être le seul à voir clair dans son jeu. Je fis claquer ma langue. La vérité rend un homme solitaire, n’est-ce pas ?

“Rem se demande à propos de quoi elles se disputent aujourd’hui.”

“Évidemment, elles se disputaient aussi à propos de sa tenue, mais le plus gros problème était la façon dont Priscilla manipulait son sac”, expliqua Julius. “Elle demandait à Al de le porter pour elle au lieu de le tenir elle-même.”

“Al c’est ce type qui porte un masque, pas vrai ?” confirmai-je.

Un homme se trouvait à côté d’Anastasia et de Priscilla, se tenant anxieusement debout tandis que les deux filles poursuivaient leur dispute animée. Il n’était pas particulièrement grand, mais il était bien bâti. Il avait l’air d’avoir l’âge de mon père, mais il était impossible d’en être sûr à cause du masque qu’il portait.

Plusieurs rumeurs circulaient à propos de ce masque. Certains prétendaient qu’il cachait une horrible brûlure, tandis que d’autres suggéraient que son visage était couvert de points de suture. Personnellement, j’aimais imaginer que Priscilla lui faisait porter ce masque sur un coup de tête. Je veux dire, non seulement il change de masque tous les jours, mais il ne me semble pas du tout être un homme au passé sombre.

Pour ajouter à ses caractéristiques distinctives, Al avait une prothèse au bras gauche. D’après ce que j’avais entendu dire, il s’agissait d’une prothèse de haute qualité, acquise grâce aux relations familiales de Priscilla. Une fois, il m’avait ouvert une boîte de pêches à l’aide d’un ouvre-boîte fixé à son bras. Son bras était comme un couteau suisse.

“Combien de fois dois-je te le dire ?!” La voix d’Anastasia résonna. “Un étranger ne peut pas entrer dans le bâtiment de l’école. Sais-tu à quel point c’est stressant de devoir expulser un adulte que je trouve en train d’errer dans le bâtiment ?”

“Ce ne sont pas mes affaires”, rétorqua Priscilla. “Personne ne te demande de le mettre à la porte. Ignore-le. De toute façon, il n’est jamais là que pour s’occuper de moi. De plus, s’il n’est pas là, qui portera mon sac ? Je refuse de porter quelque chose de plus lourd qu’une paire de baguettes.”

“Il est vide ! C’est pratiquement le même poids qu’une paire de baguettes !”

Anastasia s’irritait manifestement à chaque fois que Priscilla rétorquait. L’intensité de la situation ne cessait de croître, à tel point que je craignais qu’un crêpage de chignon n’éclate si cela continuait. Dans ce cas, c’était Anastasia qui serait blessée. Bien qu’elle n’en ait pas l’air, Priscilla était étonnamment athlétique. En fait, il était même possible qu’elle provoque Anastasia pour qu’elle donne le premier coup de poing. Non, non, j’y réfléchis trop. Elle est d’un naturel provocateur.

“Les choses ne se présentent pas bien pour Ana”, commenta Julius. “Je suppose que je n’ai pas d’autre choix que d’aller les arrêter.”

“Ouais, ouais, va faire ça”, approuvai-je. “Avant qu’elles ne se battent et que les choses ne dégénèrent et que l’infirmière Elsa n’en entende parler.”

L’infirmière Elsa était l’infirmière de l’école, connue pour son apparence sexuellement provocante et ses propos bizarres. Elle était toujours prompte à entendre parler des conflits qui se produisaient à l’école et semblait souvent neutraliser la situation, prétextant qu’elle ne pouvait rien contre ses vieilles habitudes. Tous les élèves qu’elle emmenait à l’infirmerie en revenaient toujours parfaitement obéissants. Personne ne savait ce qu’on leur faisait là-bas, car elle refusait de répondre. Par conséquent, tout le monde s’accordait à dire qu’elle pratiquait une horrible opération sur le système digestif de ses patients pour les rendre dociles.

“Les cours sont sur le point de commencer, de toute façon”, dit Crusch, qui était maintenant à nos côtés. “Va dans ta classe, Natsuki Subaru. Nous nous occupons du reste.”

“Oh nyon, c’est à nous de le faire”, ajouta Félix.

“Le faire volontairement pour améliorer l’école fait partie du travail du conseil des élèves.”

Sur ce, les trois membres du conseil des élèves se dirigèrent vers le lieu de l’agitation. Je suis sûr que même Priscilla reculera une fois qu’elle sera face à ces trois-là.

“Nous sommes restés trop longtemps ici”, dis-je. “Allons dans notre salle de classe. Je suis fatigué.”

“Il se passe tellement de choses ce matin”, commenta Rem.

“Sérieusement. Mais je suis sûr qu’il n’y aura pas d’autres problèmes.”

Il y avait de fortes chances que je me sois porté la poisse en disant une telle chose. Même si je souhaitais sincèrement ne plus rencontrer de problèmes lorsque je l’avais dit, il semblait que Dieu avait d’autres projets pour moi. Le problème suivant apparut après que j’eus mis mes chaussures d’école et que j’eus commencé à marcher vers ma salle de classe.

“Hey, Subaru ! Réflexe, attrape !”

“Hein ?”

Surpris par la voix soudaine et par une fille qui courait vers moi, je baissai instinctivement les hanches et me mis en position de réception pour le volley-ball, comme on me l’avait demandé. C’est alors qu’un petit pied atterrit sur mes mains.

“Réception de la Montagne Bleue !” cria la silhouette.

Réagissant à ce qui semblait être le nom d’une technique, je balançai mes bras vers le haut avec la personne sur mes mains, laissant échapper un grand “Hmph !”. Même si je ne pouvais pas dire que la fille était aussi légère qu’un ballon de volley, elle réussit à voler au-dessus de ma tête et à atterrir sur l’étagère à chaussures derrière moi.

Je me retournai pour voir de quoi il était question. Mais la fille posa son index sur ses lèvres, m’indiquant de me taire, avec un chuintement. Rem et moi nous regardâmes mutuellement, déconcertés par toute cette situation. Puis, de la même direction que la fille, un homme incroyablement beau, affichant un sourire à un million de dollars, arriva en courant.

“Timing parfait. Rem, Subaru”, dit l’homme.

Il avait des cheveux rouges distinctifs, des yeux bleus comme un ciel limpide et une apparence physique qui criait la perfection. C’était Reinhard, le tombeur de l’école, aimé de toutes les filles de l’école et même des dames du quartier commerçant, qui s’approchait maintenant de moi avec une expression plutôt affligée.

“Yo, quoi d’neuf ?” dis-je.

“Ce n’est rien de grave”, dit-il. “Mais avez-vous vu Felt par hasard ?”

“Felt ?” répondit Rem. “Eh bien, elle est euhh…”

Rem se tourna vers moi d’un air troublé. Toutefois, je compris rapidement la situation. Que faire maintenant ? Je m’interrogeai une seconde avant de laisser échapper un soupir d’exaspération. Je suppose que je n’ai pas le choix.

“Non, je ne l’ai pas encore vue”, mentis-je. “Pourquoi ? Il y a un problème ?”

“Non”, répondit Reinhard. “Je l’ai croisée tout à l’heure et j’ai voulu l’inviter à déjeuner… Mais avant que je ne puisse le faire, elle s’est soudain mise à courir dès que nos regards se sont croisés.”

“C’est bien le genre de Felt”, commentai-je. “Et tu n’abandonnes pas facilement non plus, n’est-ce pas ?”

En tant qu’homme, j’admirais sa ténacité, mais je me demandais aussi pourquoi il était aussi obsédé par Felt. “Je veux dire, je ne dis pas que tu peux attraper toutes les filles que tu veux, mais avec ton physique, tu ne devrais pas avoir de problème pour te trouver une petite amie.”

“C’est difficile à expliquer”, répondit Reinhard. “N’est-ce pas ainsi que ces choses fonctionnent ? Tu ne crois pas, Subaru ? Rem ?”

“Je ne sais pas, mec.”

“Rem le pense aussi !” répondit cette dernière avec enthousiasme. “Alors Rem va t’encourager !”

Se réjouissant des paroles de Rem, Reinhard redressa son col. “Bon, je vais aller la chercher.”

“Pourquoi ne l’attends-tu pas dans la salle de classe ?” suggérai-je. “Le cours est sur le point de commencer de toute façon.”

“Abandonner ce que je n’ai pas terminé n’est pas mon genre. Je veux au moins la saluer comme il se doit.” Puis il leva la main et dit : “À bientôt, tous les deux”, et s’en alla.

Même s’il ne faisait que marcher, Reinhard avait disparu de notre champ de vision en un clin d’œil. Confirmant qu’il avait complètement disparu, je soupirai et tapai sur l’étagère à chaussures derrière moi. “Yo, il est parti. Tu peux descendre maintenant.”

“D’acc ! Merci”, dit la fille d’une voix nonchalante. Je l’entendis atterrir sur le sol derrière moi.

C’était une petite fille avec des cheveux dorés, des yeux cramoisis et une canine distinctive. Elle s’appelait Felt. Elle était la fille la plus chanceuse de l’école qui avait attiré l’attention de Reinhard. Cependant, elle mettait toujours l’accent sur le mot “à contrecœur” lorsqu’on lui disait cela.

“Tu ne devrais pas être aussi froide avec lui”, dis-je. “Je me sens mal pour lui.”

“C’est pour moi que tu devrais te sentir mal”, déclara Felt. “Qui lui a demandé de me poursuivre ? C’est moi la vraie victime ici.”

“Mais Reinhard est tellement passionné par toi”, dit Rem. “Tu ne l’aimes pas, Felt ?”

“Bien sûr que non. Et ne te fais pas de fausses idées. Il m’aime seulement parce que je suis différente. C’est comme quand une personne est excitée par la découverte d’une espèce rare. Laisse-moi respirer.”

Felt n’avait rien de bon à dire à propos de Reinhard, comme d’habitude. Même si elle vivait une vie plus romantique que celle d’un manga Shoujo moyen et aussi romantique que Cendrillon, son attitude restait indifférente. Même si je sympathisais avec Reinhard en tant qu’ami, je comprenais aussi ce que Felt voulait dire.

“Tu as en quelque sorte raison”, dis-je. “Ces choses sont délicates, hein ?”

Reinhard avait tellement l’habitude d’être abordé qu’il n’était pas du tout à même d’être celui qui abordait. Il était naturel que Felt se méfie de ses intentions en raison de son comportement maladroit. Mais en tant que spectateur, je savais que ce n’était qu’un problème de mauvaise communication, ce qui les rendait frustrants à observer.

“Eh bien, je suppose qu’il est difficile d’évaluer objectivement nos propres actions”, dis-je.

“Oui, Rem est d’accord”, répondit Rem. “Elle est tout à fait d’accord. Tu as raison. Absolument raison.”

“Rem ? C’est quoi cette agressivité ? J’ai dit quelque chose de bizarre ?”

“Qui sait ?”, dit Rem en détournant le visage.

Alors que je contemplais l’étrange comportement de Rem, Felt épousseta sa jupe et étira le haut de son corps. “Bon, je vais continuer à courir jusqu’à ce que les cours commencent. Même lui ne me poursuivra pas une fois que la cloche aura sonné.”

“Jusqu’au changement de place”, dis-je. “Avec sa ténacité, j’ai l’impression qu’il va réussir à obtenir une place près de la tienne.”

“Ne dis pas des choses comme ça, mec. Tu vas porter la poisse à ma vie scolaire paisible.”

Pâlissant suite à mes paroles, elle partit en courant dans la direction opposée à celle de Reinhard. Le fait que Reinhard l’ait retrouvée deux minutes plus tard et qu’il se soit lancé dans une folle poursuite était une histoire pour une autre fois.

“Il n’y aura sûrement pas d’autres problèmes”, dis-je, ayant l’impression de soumettre ma demande à Dieu. “Sinon, je vais épuiser mon énergie pour la journée.”

“Rem est sûre qu’il n’y en aura pas d’autres”, me rassura Rem.

J’étais persuadé qu’une journée calme et paisible allait enfin commencer. Cependant, dès que j’ouvris la porte de la salle de classe, je fus accueilli par une silhouette hurlante.

“Tu as entendu, Natsuki-san ?!” dit la silhouette en criant. “Un étudiant transféré arrive apparemment aujourd’hui !”

“Tu n’arrives pas à lire mon humeur ?! Espèce d’idiot !” lui répondis-je en hurlant.

“Pourquoi est-ce que je me fais gronder ?!”

La silhouette criante, c’était Otto, le gars qui était assis derrière moi. Il avait toujours eu l’air d’un type malchanceux, ce qui était prouvé par le fait qu’il m’énervait encore plus que je ne l’étais déjà.

Plaçant mon sac sur mon bureau, je m’affalai sur ma chaise. “Écoute, mec. Oublie cette histoire d’étudiants transférés. Je suis déjà fatigué par tout ce qui s’est passé ce matin. Tu comprends, hein ? Alors, remets ça à plus tard.”

“Nous ne pouvons pas renvoyer l’élève transféré chez lui juste parce que tu es fatigué, Natsuki-san”, répondit Otto. “D’ailleurs, pourquoi es-tu aussi fatigué ? As-tu fait quelque chose dont tu ne peux pas parler tôt ce matin ?”

“Il y avait trop de personnages, je ne sais même pas par où commencer. À tel point que je suis sûr que personne ne se souvient du nom de ma sœur.”

“Tu vas faire pleurer Béatrice !”

En réalité, Béako n’est pas du genre sensible, donc elle ne pleurera pas à cause de quelque chose comme ça… En fait, maintenant que j’y pense, elle joue les dures, mais elle peut être assez douce. Elle pourrait même pleurer. Ce n’est pas bon signe. Voir des enfants pleurer me brise le cœur, et je ne supporterai certainement pas de voir Béako pleurer.

“Très bien, je te pardonne pour le bien de Béako.”

“Merci… Attends, en quoi cela a-t-il un sens ?”

“Alors, de quoi Otto confus veut-il nous faire part ?” demanda Rem, s’immisçant dans la conversation depuis son siège, qui était à ma droite.

“Je ne pense pas être celui qui est confus… Non, passons”, répondit Otto en se grattant la tête, renonçant à répliquer et continuant à chuchoter. “Comme je l’ai dit, il y a un élève transféré. J’ai entendu les professeurs en parler quand je suis allé dans la salle des professeurs. Apparemment, il est transféré dans notre classe.”

“Je voulais te le dire, mais tu as vraiment assumé le rôle du meilleur ami dans les simulations de rencontres, tu sais ?” dis-je. “Au fait, que pensent de moi les filles de cette classe ?”

“En dehors de Rem, tout le monde pense que tu as des yeux mauvais.”

“Tu es sérieux ? Genre, vraiment ? Tu ne plaisantes pas, n’est-ce pas ? S’il te plaît, dis que c’est le cas. Hey, allez, tu es vraiment sérieux ?”

L’évaluation d’Otto avait effacé la possibilité qu’une fille soit trop timide pour me faire des avances, puisque mon amie d’enfance Rem était toujours à mes côtés.

“Un étudiant transféré, hein ?” dit Rem. “C’est rare. C’est un garçon ou une fille ?”

“Malheureusement, je ne connais pas les détails.”

Rem soupira bruyamment. “Je vois.”

“Tu sais, soupirer comme ça, ça fait plus mal que de se faire insulter en face !”

Otto était le clown de la classe dont tout le monde se moquait. Comme d’habitude, il criait très fort et Rem hocha la tête de satisfaction en l’entendant.

La cloche retentit et les élèves qui se trouvaient à l’extérieur commencèrent à entrer dans la salle de classe. Parmi eux se trouvaient les membres du conseil des élèves, Crusch, Félix, Julius et Anastasia, qui étaient chargés d’inspecter les sacs. Ils étaient suivis de Priscilla, toujours aussi fière, et d’Al, qui portait son sac. Il quitta rapidement la salle dès qu’il eut posé son sac sur son bureau.

Lorsque je détournai mon attention d’eux, je vis Ram, qui était entrée dans la classe sans que je m’en rende compte, prenant place devant sa sœur. Étant donné qu’elle faisait un signe de paix avec sa main en direction de Rem, il semblait que sa rencontre avec Roswaal s’était bien passée.

Juste avant que la cloche ne cesse de sonner, Reinhard entra dans la salle de classe, suivi par Felt, qui s’empressa d’entrer juste au moment où la cloche s’arrêtait. Reinhard lui adressa un léger sourire depuis son siège, ce à quoi elle répondit en tirant la langue.

Ainsi, tous les élèves de la classe étaient présents. Il ne restait qu’un seul siège libre dans le coin de la dernière rangée. Je supposais que c’était là que l’étudiant transféré dont parlait Otto allait s’asseoir.

“J’étais sceptique au départ, mais le fait de voir ce siège rend son histoire plus crédible”, murmurai-je pour moi-même.

“Natsuki-san, as-tu quelque chose contre…” commença Otto avant d’être interrompu par Rem.

“Oh, Mademoiselle Frédérica est là.”

Je sentais Otto bouder derrière moi, mais je décidai évidemment de l’ignorer. La salle de classe devint complètement silencieuse.

La porte s’ouvrit et une femme de grande taille, bien droite, entra. Elle avait de longs cheveux blonds et des yeux émeraude. Vêtue d’un tailleur bien ajusté, elle dégageait une énergie juvénile. Son seul défaut était sa bouche féroce, mais cette imperfection permettait de s’entendre facilement avec elle. C’était Mademoiselle Frédérica, notre professeur. Elle était également la sœur aînée de Garfiel, que nous avions rencontré sur le chemin de l’école.

“Levez-vous”, ordonna Crusch d’une voix claire depuis le premier rang.

Tout le monde se leva à l’unisson. Même la rebelle Priscilla fit de même. Ça montre que ce commandement est ancré dans notre ADN.

“Saluez”, ordonna à nouveau Crusch.

“Bonjour”, résonnèrent des voix qui se chevauchaient.

La voix de chacun variait légèrement. Je l’avais dit d’une voix sincère, alors que Rem avait l’air beaucoup plus disciplinée.

“Prenez place”, commanda une dernière fois Crusch.

Tout le monde s’assit, en faisant plus de bruit que lorsqu’ils s’étaient levés. Alors que les grincements des sièges s’estompaient, ce fut enfin le moment pour Mademoiselle Frédérica de commencer à parler.

“Eh bien, bonjour à tous”, dit-elle. “Je suis sûre que beaucoup d’entre vous ne sont pas enthousiastes à l’idée que le week-end se termine, mais il en va de même pour nous, les enseignants, alors supportez-le, d’accord ?”

Sa plaisanterie inattendue adoucit l’atmosphère quelque peu tendue qui régnait dans la salle de classe en ce lundi. Elle désigna ensuite le siège vide au fond de la salle.

“Je suis sûre que beaucoup d’entre vous qui ont remarqué ce siège, ou qui l’ont appris de la bouche d’Otto qui écoutait aux portes, le savent maintenant, mais nous avons un étudiant transféré aujourd’hui.”

“Elle sait que tu écoutais aux portes”, dis-je.

“Hein ? C’est étrange”, dit Otto en penchant la tête. “J’étais pourtant très prudent…”

“Le proviseur Wilhelm t’a remarqué”, expliqua Mademoiselle Frédérica, ce à quoi il répondit par un hochement de tête compréhensif.

Le proviseur Wilhelm était un homme âgé qu’il ne fallait pas sous-estimer. Il avait beau essayer de dissimuler sa nature sous une apparence douce, il ne parvenait pas à cacher son air de compétence. Il surgissait souvent de nulle part, soit pour aider à résoudre un problème, soit pour se vanter de sa famille. Personne n’échappe au regard du proviseur Wilhelm. C’était un fait connu de tous au lycée Lugnica.

“En mettant de côté l’imprudence d’Otto Suwen,” dit Crusch, “un étudiant transféré est rare.”

“C’est vrai”, ajouta Félix. “Ce n’est même pas le début de l’année scolaire ou du semestre. Maintenant que j’y pense, un étudiant transféré au lycée est plutôt rare. Bien que ce soit un phénomène courant dans les mangas…”

“Et comme on le voit généralement dans les mangas”, commença Mademoiselle Frédérica, “l’étudiant transféré est une fille”.

Certains garçons de la classe s’excitèrent un peu trop suite à la dernière remarque de Mademoiselle Frédérica. Le trio TonChinKan était particulièrement bruyant. Ils ne se rendent pas compte que nous avons déjà suffisamment de jolies filles dans notre classe, et qu’en ajouter une ne ferait qu’ajouter une fille de plus avec laquelle nous ne pourrions rien faire ? J’avais pitié d’eux, même si j’étais le plus bruyant.

“Alors tu es ravi que l’élève transféré soit aussi une fille, hein, Subaru ?” demanda Rem.

“J’ai pensé que je devais au moins faire semblant d’être heureux”, répondis-je. “J’accueillerais évidemment n’importe qui, même si c’est un garçon. Il est difficile d’imaginer une plus grande tragédie que d’avoir des gars comme Reinhard et Julius dans la même classe.”

En ayant les deux garçons les plus populaires dans la même classe, tous les autres hommes avaient renoncé à attirer l’attention des femmes. D’une certaine manière, cela avait contribué à unifier les garçons de la classe. Ainsi, même si nous avions un élève masculin transféré, nous étions tous prêts à accepter la nouvelle victime à bras ouverts.

“Cette classe a déjà trop de beaux garçons et de belles filles”, dis-je. “C’est franchement trop avec des filles comme Crusch, Anastasia, Felt, Priscilla, Ram, et toi. Je suppose que je peux aussi ajouter Ferris à la liste.”

“Tu es aussi inclus dans la liste des belles personnes”, précisa Rem.

“Ouais, je suis sûr que je suis très populaire auprès d’un groupe restreint de personnes qui aiment les yeux sanpaku !”

(Note de Traduction : Les yeux sanpaku sont des iris entourés de blanc sur 3 côtés. Plus d’informations ici.)

Je savais que Rem essayait seulement de me faire sentir mieux, mais mes expériences de vie m’avaient rendu trop cynique pour être heureux simplement en sachant qu’il y avait une petite minorité de personnes qui aimaient mon apparence.

Qu’il s’agisse d’un garçon ou d’une fille, j’accepterai tout nouvel arrivant.

“Alors, Mademoiselle Frédérica”, dis-je en lui adressant un pouce levé. “Nous sommes prêts quand vous l’êtes.”

“Très bien, maintenant que j’ai obtenu la permission de Natsuki, qui mène la danse pour une raison ou une autre, veuillez accueillir votre nouvelle camarade de classe”, dit-elle en souriant amèrement tandis qu’elle appelait l’élève dans le couloir. “Entre donc.”

La porte de la salle de classe s’ouvrit après une brève pause. Des pas, suivis d’un léger vent, pénétrèrent dans la salle. Malgré mon apathie initiale face à l’arrivée de la nouvelle élève, je déglutis en la voyant.

Elle avait de longs cheveux argentés qui flottaient au vent et nous fixait directement avec des yeux améthyste. Elle portait un uniforme noir――qui devait provenir de son ancienne école――qui contrastait joliment avec sa peau blanche et pâle. La combinaison des deux semblait représenter son air éphémère et son extravagance innée――la perfection totale. Sa beauté m’avait coupé le souffle, même si j’étais habitué à voir de jolies filles.

Mademoiselle Frédérica inscrivit son nom sur le tableau derrière elle. Elle jeta un coup d’œil au tableau, puis se retourna et s’inclina devant nous. “Je m’appelle Émilia. Je suis consciente que c’est vraiiiiment un drôle de moment pour changer d’école, et que ça a dû être un peu une surprise, mais j’ai hâte de devenir amie avec vous tous.” Elle parcourut la salle de classe du regard, un peu nerveuse. “Je peux aussi être un peu sotte, alors soyez indulgents avec moi.”

“Personne n’utilise le mot “sotte” de nos jours…” lâchai-je involontairement.

Je couvris rapidement ma bouche avec ma main, mais Émilia me regardait déjà en face. Mes yeux devaient être grands ouverts. Imperturbable, elle me sourit d’un air séduisant. J’étais envoûté.

Ce n’était pas le début de l’année scolaire ou d’un semestre. C’était un lundi ordinaire. Bien qu’il ait commencé un peu plus bruyamment que d’habitude, c’était censé être un jour normal. Néanmoins, à ce moment-là, j’eus le sentiment que mes jours paisibles étaient sur le point de s’achever. Avec l’arrivée de la nouvelle élève――Émilia――ma vie ne serait plus jamais la même.


À suivre…

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