Arc V – Chapitre 30 – « Tigre et chat sous la lune »

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Traduit par : Nanashi-tan

Traduit de l’anglais par : FireSun

Relu par : Martin

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Artiste du fan-art : ???

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ARC V – LES ÉTOILES QUI ÉCRIVENT L’HISTOIRE

Chapitre 30 – « Tigre et chat sous la lune »

??? : “Je suis vraiment désolée, je n’attendais pas d’invités, donc la maison n’est pas très bien rangée.”

Mimi : “Hmm~ ! Ça ne nous dérange pas~ ! Ça a l’air propre~ ! Très propre~ ! La chambre de Mimi est beaucoup plus chaotiiiique~ !”

??? : “Ah, ah, ce n’est pas bien.”

La femme caressa nonchalamment Mimi, qui s’était assise sur le canapé, battant des jambes et semblant très à l’aise. Mimi émit des bruits joyeux, complètement détendue en présence de la femme.

Plongé dans cette scène, Garfiel observa silencieusement la femme. Ses longs cheveux blonds descendaient jusqu’à sa taille, sa peau était claire comme la neige, son corps mince présentait les courbes d’une femme, et son visage doux affichait une paire d’yeux vert émeraude clair et calmes.

Son apparence juvénile correspondait à celle d’une femme d’une vingtaine d’années, mais Garfiel savait qu’elle devait avoir une trentaine d’années. Le fait qu’elle ne corresponde pas aux attentes de Garfiel était précisément la source de sa confusion.

??? : “Gorgeous Tiger-san, le thé ne correspond pas à vos goûts ? Je suis désolée, je n’ai même pas pensé à vous demander ce que vous aimeriez boire…”

La femme――une femme qui prétendait être Reala Thompson fronça les sourcils en direction de Garfiel qui restait silencieux. La voix de la femme le ramena à la réalité. Il baissa les yeux sur la tasse de thé qu’on lui avait servie et s’empressa de la saisir.

Garfiel : “Non, non, mon incroyabl’ personne était juste un peu dans les nuages… J’trouve juste que cette pièce est anormalement grande, c’est tout.”

Reala : “Vraiment ? Ma famille est très grande et donc notre maison aussi… mais c’est difficile à nettoyer. On dirait que j’ai encore été négligente.”

Reala accepta l’excuse précipitée de Garfiel sans le moindre doute, riant élégamment en se mettant la main sur la bouche. Elle était vêtue de vêtements bien taillés, adaptés à la vie dans un manoir que l’on ne pouvait qualifier que de grand.

Son sourire, son timbre doux, tout en elle frappait Garfiel de nostalgie. Cependant, Reala ne mentionna pas une seule fois le regard de Garfiel. Ce seul détail serra le cœur de Garfiel de douleur.

La femme qui prétendait être Reala Thompson ressemblait exactement à la femme qui avait été imprimée clairement dans son esprit――Reshia Tinzel, la mère de Garfiel.

La séparation de Garfiel avec sa mère s’était produite peu de temps après sa naissance, alors qu’il n’avait aucune conscience de lui-même, si bien que les souvenirs qu’il avait de sa mère étaient maigres. Pourtant, Garfiel connaissait les moindres détails de son visage, après l’avoir vue dans ce détestable Tombeau où s’était déroulée l’Épreuve. C’est là qu’il avait assisté à sa séparation avec sa mère.

Son visage, sa voix, son amour, Garfiel les connaissait tous depuis l’Épreuve. Et cette même Épreuve lui avait révélé la mort malheureuse qui l’avait atteinte peu de temps après son départ. Ainsi, pour Garfiel, revoir sa mère était un rêve impossible.

Mais si c’était le cas, qui était cette femme devant lui ?

Reala : “Mimi-san, vos oreilles ont l’air si douces. Serait-il possible pour moi de les toucher ?”

Mimi : “Allez-y, je vous en prie~ !”

Reala tendit joyeusement la main en direction de Mimi, qui étirait sa tête, et caressa les oreilles de Mimi d’un air satisfait.

Le sourire de Mimi était digne d’une petite fille. Ils formaient un duo étrange, un petit homme-bête et un demi-humain suspicieux aux allures de voyou, mais ils avaient été invités à entrer sans la moindre hésitation. Cette femme n’avait tout simplement aucun sens de la méfiance.

De telles attitudes étaient, pour Garfiel, toutes associées à un esprit maternel.

Sa mère, Reshia, avait été une femme bien malchanceuse. Ses parents avaient tout perdu à cause des dettes et l’avaient vendue à un groupe de marchands d’esclaves qui, à leur tour, étaient tombés dans une embuscade tendue par des bandits demi-humains. Ils avaient fait de Reshia leur jouet.

En cours de route, elle était tombée enceinte de Frédérica et, lorsque le ventre de sa mère avait gonflé, les bandits l’avaient tout simplement abandonnée. Après cela, elle avait été enlevée par une autre bande de voleurs et avait passé un long moment avec eux.

Sa sœur aînée Frédérica avait grandi dans ce groupe de bandits et se souvenait de cette époque. Bien qu’elle n’aime pas en parler, le fait que Reshia soit partie dès qu’elle est tombée enceinte de Garfiel indique que l’environnement était plutôt médiocre.

Subissant malheur sur malheur, Reshia avait erré avec sa fille, tout en portant un enfant. Heureusement, elle avait été secourue par Roswaal, un noble prétentieux. Il lui avait fait une proposition――il les emmènerait au Sanctuaire, où ils seraient nourris, à l’abri et en sécurité. C’est dans le Sanctuaire qu’était né Garfiel, et Lewes était devenu sa gardienne.

La vie avait traité sa mère d’une manière que l’on ne pouvait que qualifier de “cruelle”.

Toutefois, la personnalité de sa mère était inconnue de ceux qui n’avaient entendu que ses histoires. Ceux qui connaissaient vraiment sa mère n’auraient jamais donné à sa vie une évaluation aussi malheureuse.

Lewes : “Ah, Reshia. Cette fille était toujours inexplicablement, bizarrement optimiste, toujours tournée vers l’avenir. Malgré des journées douloureuses où elle aurait pu mourir, elle disait toujours : “Peut-être que quelque chose de bien arrivera demain. Même si c’est dur aujourd’hui, demain sera peut-être meilleur”. Comme un petit enfant, elle attendait toujours avec impatience les petites choses heureuses de la vie.”

Frédérica : “Notre honorable mère était… elle a pu être considérée comme une femme stupide par d’autres… personnes. Pour être honnête, je crois qu’elle n’a jamais vraiment compris les leçons sur la meilleure façon de survivre… Mais c’était une personne incroyablement merveilleuse. C’est une chose que je peux affirmer avec certitude. J’aime notre mère de tout mon cœur, et je suis heureuse d’être sa fille.”

Roswaal : “Est-ce à propos de ta mère, Reshia-san ? Bien que je n’aie pas eu beaucoup d’ooooccasions de discuter avec elle en face à face… c’était quelqu’un d’étrange. Ou peut-être vaudrait-il mieux dire incroyable ? Elle était beauuuucoup plus sensible au bonheur que la plupart des gens. Elle était toujours joyeuse, trouvant le bonheur mêêêêeme dans les pires situations. Ouiiii, ce n’est pas quelque chose qui m’a dééééplu.”

Lewes, Frédérica et même Roswaal parlaient tous d’elle avec tendresse. Au sein du Sanctuaire, tous ceux qui avaient connu sa mère disaient la même chose. Elle avait toujours été détendue et heureuse.

Si cela n’avait pas été le cas, elle ne serait pas partie chercher bêtement le père de Garfiel, qui avait plus que probablement subi un malheur. Et puis elle avait aussitôt subi un autre malheur et était morte, quel bonheur avait-elle obtenu ?

――Il n’avait jamais trouvé de réponse quant à l’endroit où se trouvait le bonheur de sa mère. 

Garfiel : “Si je ne peux pas le trouver, j’aurais dû abandonner…”

Alors qu’il serrait le poing, ses ongles s’enfoncèrent dans la paume de sa main, à tel point que le sang était sur le point de jaillir. Il aurait dû abandonner. Mais il n’avait jamais compris cela. Il lui avait fallu du temps, mais il avait fini par l’accepter.

C’était manifestement le cas, mais pourquoi, maintenant, était-elle réapparue ? Comme elle l’avait toujours été, avec une attitude insouciante et joyeuse qui lui indiquait qu’elle ne le connaissait pas ?

Garfiel : “――――”

Pour éviter qu’elle ne s’en aperçoive, il s’était résigné à observer secrètement ses expressions et ses comportements.

Rien ne semblait anormal. Il était évident que sa mère le traitait comme un étranger, comme si c’était tout à fait naturel.

Était-ce sa réponse ?

Elle avait une nouvelle vie. Ignorant tout de Garfiel, elle menait une vie heureuse. Elle avait atteint le bonheur ainsi, en chassant les promesses qu’elle avait faites autrefois.

“Je ne veux pas connaître tes histoires”, telle était la réponse de sa mère à――  

Fred : “Mèèèèère.”

Sœur : “Maman, j’ai faim.”

Garfiel était resté silencieux pendant que Mimi et Reala s’amusaient. Le frère et la sœur les rejoignirent dans le salon après être allés se changer dans leur chambre.

La sœur jeta un regard sévère à Garfiel, puis se blottit immédiatement contre sa mère. 

Sœur : “Maman, dis aux invités de rentrer chez eux, et ensuite nous pourrons manger.”

Reala : “En tant que grande sœur, qu’es-tu en train de dire ? Gorgeous-san et Mimi ont pris soin de Fred quand il a failli se noyer. Nous leurs sommes redevables.”

Sœur : “À ce propos, ne serait-ce pas ce Gorgeous le responsable ? Pour qu’il puisse venir chez nous et profiter de notre générosité. Peut-être qu’il veut de l’argent.”

Reala : “Hey là, ça va trop loin. Mais tu as raison, nous devons le remercier pour Fred… Devrions-nous lui donner de l’argent ?”

Sœur : “Maman ?!”

La sœur, qui avait compris que ses paroles allaient devenir la cause de la faillite de sa famille, fut prise de panique. De son côté, Reala, qui n’avait pas compris la raison de l’emportement de sa fille, jeta un coup d’œil confus autour d’elle.

Pour Garfiel, cette interaction souriante entre parent et enfant rendait sa respiration plus difficile que de marcher pieds nus sur des épines. Vidant son thé d’un trait, Garfiel posa sa tasse avec un bruit sourd.

Garfiel : “Puisqu’mon incroyabl’ personne n’a pas l’air d’être la bienvenue ici, nous allons partir.”

Mimi : “Haauhh ? Pourquoi~ ?”

Garfiel : “Aucune raison particulière.”

Malgré la volonté de Garfiel de partir, Mimi continuait à résister. Cependant, comme s’il ne l’avait pas entendue, Garfiel la prit dans ses bras. Alors qu’il se levait pour partir, Reala eut l’air désemparée, tandis que sa fille lui adressait un sourire en coin.

Eh bien, Garfiel respecterait ses sentiments――et, sur cette pensée,

Fred : “Ne t’en va pas, Gorgeous Tiger…”

Saisissant l’ourlet du pantalon de Garfiel, le petit frère lui bloqua le passage. Pendant une seconde, pour des raisons qu’il ignorait, Garfiel hésita à se débarrasser des petites mains. Mais,

Sœur : “Fred, honnêtement, tu es…”

Alors que le jeune frère plaidait pour qu’un criminel suspect reste, la sœur aînée plaça ses mains sur sa taille en signe de colère. Reala frappa dans ses mains, captant l’attention de tous avant que la sœur ne saute sur son frère.

Reala : “Tout le monde, écoutez, ce n’est pas bien de ne pas s’entendre. Tu pousses nos invités à partir, Fred a l’air de vouloir qu’ils restent, alors ne les force pas à faire quoi que ce soit, onee-chan.”

(Note de Traduction : Si vous ne l’avez pas encore remarqué, Reala appelle sa fille “grande sœur” (onee-chan).)

Sœur : “Mais, maman…”

Reala : “Pas de mais. Gorgeous-san et Mimi, restez un peu, voulez-vous ? Je serais ravie de partager le dîner avec vous, et le repas de ce soir est mon meilleur plat.”

Fred : “Mamaaaaan, tu considères tout comme ton meilleur plat…”

Reala : “Mhm, n’est-ce pas évident ? Maman donne toujours le meilleur d’elle-même dans tous les plats qu’elle prépare pour vous.”

Toutes les personnes présentes arboraient une expression paniquée à l’égard de Reala, qui gonflait son biceps. Mais Garfiel plus que quiconque.

Cette atmosphère harmonieuse. Elle transperçait profondément le cœur de Garfiel.

Les paroles de Reala lui procuraient un sentiment unique de bonheur et d’impuissance. Accepter son invitation serait la pire chose que Garfiel puisse faire.

Garfiel : “Désolé pour votre invitation, mais certains d’mes compagnons m’attendent. Ils s’ront inquiets si nous sommes en r’tard, alors nous devrions partir bientôt.”

Reala : “――――”

Réprimant la douleur dans sa poitrine, Garfiel pria pour que sa voix ne tremble pas.

Face à cette réponse, le visage de la sœur se figea et Reala fronça les sourcils, le regard baissé. Et,

Reala : “Je comprends, ça ne sert à rien de vous forcer à rester si ça vous dérange. C’est comme on dit, “Montrez l’hospitalité à vos invités et sowaré”.”

(Note de traduction : Reala semble utiliser une forme corrompue du mot “soirée” lorsqu’il est converti en Katakana, “ソワリエ”, au lieu de “ソワレ”. De toute évidence, ce terme n’a pas vraiment de sens dans le contexte.)

Garfiel : “――Hk.”

Cet échange avait été celui qui avait le plus blessé Garfiel ce jour-là. La défaite contre Reinhard lors de ce duel et l’impact initial en voyant Reala semblaient si minuscules, si insignifiants, comparés à ce qu’il ressentait maintenant.

Inconsciemment, Garfiel plaça une main près de sa poitrine, comme s’il avait besoin de confirmer si son corps avait été déchiré ou non. Et devant cet état de Garfiel――

Mimi : “Garfiel, allons-y.”

Mimi, qui avait refusé de partir jusque-là, prit doucement la main de Garfiel dans la sienne et commença à l’emmener. Face à sa préoccupation, Garfiel obéit silencieusement. Ainsi, les mains sur la poignée de la porte du salon, prêts à sortir,

??? : “Je suis rentré ! Oh, nous avons des invités ?”

De l’autre côté de la porte, apparut la silhouette d’un gentilhomme arborant une magnifique barbe.

Il semblait être un homme portant des vêtements bien taillés et dégageait une atmosphère énergique. D’après le ton de sa voix et les traits de son visage, il semblait être un homme accompli.

À l’apparition de cet homme, les enfants se levèrent avec joie. Alors, cet homme était――

Père : “Hmm… Je n’ai jamais vu le visage de cet étranger auparavant.”

Fred : “Papa, voici Gorgeous Tiger.”

Sœur : “C’est une personne suspecte.”

Père : “Quoi ?”

Face aux attitudes très contrastées de son fils et de sa fille, le père pencha la tête en signe de désarroi. Il se tourna vers Reala, qui se tenait tranquillement dans le salon.

Sous le regard affectueux de l’homme, Reala détendit ses joues. 

Garfiel atteignit sa limite.

Garfiel : “C’est rien, on partait d’toute façon.”

Laissant cette phrase derrière lui, Garfiel attrapa Mimi et sortit précipitamment de la pièce, se précipitant vers la porte d’entrée comme s’il s’agissait d’une fuite.

Fred : “Gorgeous Tiger !”

Derrière lui, une voix triste appelait Garfiel. Cependant, Garfiel ne possédait pas de réponse à cet appel.

Qui était Gorgeous ? Qu’est-ce que Tiger ? Il était Garfiel, pas Gorgeous Tiger. Où était passé ce tigre doré ? Un tigre était une créature forte et puissante que rien ne pouvait ébranler.

Où était le tigre maintenant ? Un vrai tigre ne serait pas aussi affecté par de telles choses, n’est-ce pas ? 

Mimi : “Garf ! J’ai mal à la main !”

Garfiel : “――Hk.”

Trop concentré sur ses pensées, Garfiel ne remarqua pas ce cri de douleur.

Il ne s’en aperçut que lorsque Mimi se libéra de son étau, extrayant sa main des ongles qui s’y enfonçaient. Sa petite main était maintenant gonflée et bleue.

Garfiel : “D-désolé… mon incroyabl’ personne…”

Mimi : “Gar~f, tu étais bizarre dans cette maison aussi. Ma main me fait vraiment~ mal.”

Mimi marmonna cela doucement, et Garfiel se frappa le front de la main.

Ils tombèrent dans un silence gênant tandis que le vent humide de la cité Aqueuse leur caressait le visage. Le soleil avait complètement disparu du ciel, la ville étant enveloppée par la lumière émise par les pierres magiques. Les rayons du soleil à la surface de l’eau étaient remplacés par la lumière des lampes magiques, mais il n’était pas d’humeur à apprécier la beauté mystérieuse et silencieuse de cette scène.

??? : “Hey, vous deux, là-bas !”

Quelqu’un s’approchait de Garfiel et de Mimi, la respiration haletante.

En levant les yeux, la lumière magique révéla l’homme de tout à l’heure, qui s’était débarrassé de son manteau. Arrivé enfin devant les deux, il posa les mains sur ses genoux, haletant violemment.

Père : “Ah, je vous ai enfin rattrapé… Ça ne va pas le faire… J’avais l’habitude d’être plus énergique, mais je ne suis plus du tout en forme depuis que j’ai un travail de bureau…”

Garfiel : “…Vous avez b’soin de que’que chose de notre part ?”

Garfiel indiqua qu’il n’était pas intéressé par les paroles de l’homme.

L’existence de cet homme, même si elle n’était pas aussi importante que celle des enfants de Reala, causait également du désarroi à Garfiel. Sa voix était pleine de dureté, mais l’homme n’y prêta pas attention, posant sa main sur sa tête, affichant son embarras.

Père : “Non, ma femme m’a dit que vous étiez les bienfaiteurs de mon fils. Il serait tout à fait injustifiable que je ne vous témoigne jamais ma gratitude.”

Garfiel : “…C’est rien du tout, si vous parlez d’manière aussi importante que ça, mon incroyabl’ personne sera embarrassée.”

Garek : “Tout ce qui concerne mes enfants, quoi qu’il arrive, est extrêmement important. Le sauver du danger rend les choses encore plus importantes. Vraiment, si vous avez besoin de quoi que ce soit… Ah, je suis vraiment désolé. Je m’appelle Garek, Garek Thompson. Malgré mon apparence, je travaille à l’Hôtel de Ville de Pristella, alors si je peux faire quoi que ce soit pour vous aider…”

Garfiel : “Vraiment, nous sommes…”

Un homme qui avait un don avec les mots――Garfiel, qui souhaitait partir au plus vite, fut soudain à court de mots en essayant de s’éloigner de Garek. Mais s’il était bien le mari de Reala, s’il la connaissait vraiment, alors――

Garfiel : “Mon incroyabl’ personne n’a qu’une seule question… voulez-vous bien y répondre ?”

Garek : “Oui, n’importe quoi. Quoi qu’il en coûte, je ferai de mon mieux pour répondre.”

Garek répondit à Garfiel avec un sourire bienveillant.

Il en allait de même pour Reala et leur fils Fred. Toute cette famille était trop gentille pour son propre bien. Seule leur fille avait le sens de la méfiance.

Avec cela à l’esprit, Garfiel fit preuve d’une grande prudence dans le choix de ses mots. 

Garfiel : “Votre femme, Reala… Quel est son vrai nom ?”

Garek : “――――”

Dès que Garfiel posa sa question, l’atmosphère changea. Le sourire s’effaça du visage de Garek. Il réfléchit silencieusement à la question de Garfiel pendant quelques instants, avant de répondre d’une voix posée.

Garek : “Qu’est-ce que vous entendez par là ?”

Garfiel : “Le sens est littéral. C’est comme “Quoi qu’il arrive, Reid joue franc jeu”, pas vrai ? Jouer avec les mots est pas mon style. Dites-moi, votre femme, elle s’appelle Reshia au lieu de Reala ?”

Garek : “――Guh.”

L’expression de Garek fut déstabilisée par la déclaration directe de Garfiel. Garek prit un moment pour déglutir avant que sa voix ne s’échappe de sa bouche.

Garek : “Vous… Savez-vous quelque chose sur ma femme ?”

Garfiel : “Mon incroyabl’ personne veut aussi l’savoir.”

Garek : “――――”

Garfiel avait répondu sincèrement à la voix tremblante de Garek.

À ces mots, Garek se tut, comme s’il réfléchissait. En attendant sa réponse, Garfiel prit la bonne main de Mimi dans la sienne.

Levant les yeux vers lui, elle sourit comme à son habitude. 

Garek : “…Il semblerait que je doive vous dire la vérité.”

Alors que Garfiel jetait un regard en coin sur le sourire de Mimi, Garek prit la parole en soupirant.

Sa voix était alourdie par la fatigue et l’impuissance. Garfiel fronça les sourcils, attendant sa prochaine phrase. Puis,

Garek : “Ma femme, Reala… n’a aucun souvenir d’avant notre rencontre, il y a quinze ans.”

※ ※ ※ ※ ※ ※ ※ ※ ※ ※ ※ ※ ※

Garek avait rencontré Reala avant de devenir une personne influente dans la ville de Pristella, à l’époque où il n’était qu’un marchand enraciné à Pristella.

Ce jour-là, alors qu’il revenait de négociations qui s’étaient déroulées loin de la ville, Garek, qui conduisait un attelage draconique, s’était retrouvé bloqué par un glissement de terrain. L’affaire avait échoué et Garek n’avait pas supporté la frustration d’avoir à affronter encore plus de malheurs sur la route, alors qu’il s’efforçait de rembourser un prêt.

――Puis, dans ce tragique glissement de terrain, il avait trouvé une femme enterrée vivante. 

Cela avait été un miracle. Il n’y avait pas d’autre explication.

Refusant de faire un détour, Garek s’était désespérément demandé s’il pouvait encore suivre son itinéraire initial. C’est à ce moment-là que la forte pluie s’était enfin arrêtée et que Garek avait retrouvé tout son champ de vision.

Garek avait découvert le glissement de terrain peu de temps après qu’il se soit produit, ce qui signifiait que la femme avait été enterrée depuis peu de temps.

Grâce aux différents miracles qui s’étaient succédé, Garek avait retrouvé et sauvé la femme, qui respirait encore.

Elle avait été couverte de boue et il n’avait trouvé aucun bagage près d’elle. Ramenant la femme inconsciente dans son carrosse draconique, Garek s’était immédiatement rendu dans une ville voisine, où elle avait été emmenée dans une clinique en attendant d’être réhabilitée.

Garek : “À l’époque, son état était extrêmement précaire. Elle avait une forte fièvre et souffrait de diverses blessures et fractures dues au glissement de terrain. Son cœur s’était même arrêté à un moment donné pendant le traitement.”

Alors que cette situation improbable s’était prolongée, les employés de la clinique et Garek s’étaient efforcés de l’aider, en espérant qu’elle se rétablisse. Pourquoi Garek avait-il voulu si désespérément la sauver ? Il y avait bien une raison, encore inconnue de lui, qui expliquait ses actes.

Il était reconnaissant des efforts de chacun, du fond du cœur.

Garek : “Le travail acharné a payé et elle a survécu. Bien qu’elle était encore lourdement blessée, je me souviens avoir été très soulagé lorsqu’il est apparu clairement que sa vie n’était plus menacée. Elle s’est réveillée peu après. Il a fallu une semaine… Je suis resté dans la ville, en attendant qu’elle se réveille.”

L’échec des négociations avait assombri l’avenir de l’entreprise de Garek.

Dans cette situation, perdre du temps équivalait à perdre de l’argent. Garek ne comprenait pas pourquoi il s’était abstenu de voyager. Mais quelque chose d’inconnu l’avait poussé à s’enraciner là.

Puis, au bout d’une semaine, la femme s’était réveillée.

Après son réveil, tout le monde s’était réjoui. D’une voix tremblante et faible, elle s’était adressée à la foule rassemblée autour d’elle.

Garek : “Qui suis-je ?”, furent ses premiers mots.”

La femme avait oublié son nom. Non, pas seulement son nom. Elle avait tout oublié.

Qui elle était, d’où elle venait, et qu’est-ce qu’elle avait essayé de faire ? Que s’était-il passé avant que la falaise ne s’effondre ?

Tout le monde avait été désemparé quant à son traitement, car elle ne s’était pas souvenue des membres de sa famille. Elle n’avait que les vêtements qu’elle portait lors de l’accident. Cousues sur le tissu, se trouvaient les seules lettres discernables de son nom, ou peut-être même un acronyme. “Re”.

Garek : “Influencé par le nom d’une fleur en éclosion, j’ai décidé de l’appeler Reala. Ensuite, j’ai prévu de m’occuper d’elle jusqu’à ce que ses blessures soient complètement guéries.”

Ses blessures avaient cicatrisé peu à peu et, très vite, elle avait quitté la clinique.

Reala, même en n’ayant nulle part où aller, était restée une femme joyeuse. Elle avait traité ce terrible accident comme s’il n’avait jamais eu lieu, et elle avait le pouvoir de faire sourire tous ceux qu’elle côtoyait.

Dans sa situation, il était impossible de ne pas se sentir mal à l’aise. La perte de ses propres souvenirs équivalait à la perte de sa propre existence. Mais elle avait continué à sourire, parce qu’elle en ressentait le besoin.

Ou peut-être avait-elle été préoccupée par les personnes qui l’entouraient.

Mais la raison la plus importante résidait dans le fait qu’elle ne se considérait pas comme malchanceuse.

Garek : “La nervosité que j’ai ressentie en lui avouant mes sentiments, en lui demandant de venir avec moi, est encore fraîche dans ma mémoire. Le temps qui s’est écoulé entre ma question et sa réponse constitue probablement le moment le plus angoissant de ma vie. Encore plus que lorsque je l’ai demandée en mariage.”

Ainsi, en acceptant la proposition de Garek, Reala s’était rendue avec lui à Pristella.

La raison pour laquelle il avait refusé de l’abandonner, la raison pour laquelle il avait attendu si longtemps qu’elle se réveille, était incroyablement simple.

À ce moment-là, lorsqu’il l’avait extraite du glissement de terrain, transportée jusqu’à son carrosse draconique et nettoyé la boue sur son visage, Garek était tombé amoureux d’elle sur-le-champ.

Garek : “Mes affaires, qui n’avaient pas été florissantes jusqu’à ce que j’emmène Reala, se sont rapidement améliorées. Les gens autour de moi disaient que c’était grâce à mon talent. C’est ridicule, c’est grâce à Reala. Elle m’a porté chance, elle m’a béni, et maintenant je peux être un marchand pareil, un administrateur de la ville, et un père.”

Garfiel : “――――”

Garek : “J’aime ma femme et nos enfants sont tous les deux très mignons. Je me souciais de son passé, mais aujourd’hui, peu importe qui elle était avant, je considère ma femme comme la personne la plus importante.”

Garek finit de parler de tout, depuis leur première rencontre jusqu’à aujourd’hui, et conclut ainsi avec embarras.

Garfiel, qui était resté silencieux du début à la fin, écoutant attentivement, leva les yeux au ciel.

Dans l’obscurité, les étoiles étaient dispersées partout. La glorieuse pleine lune et le scintillement des étoiles regardaient probablement ses pensées actuelles.

Garek : “Je suis désolé de vous demander cela, mais je ne peux m’empêcher de le faire.”

Garfiel : “――――”

Garek : “Quelle est la relation entre vous… et ma femme, Reala ?”

Ô combien cette question était cruelle.

Son champ de vision passa du ciel à Garek, devant lui.

Les yeux doux de Garek étaient pleins de détermination alors qu’il fixait Garfiel. Il ne serait pas insensible au point de se méprendre sur ce que Garfiel allait dire, ou sur les émotions qu’il ressentait.

Garfiel savait donc exactement quelle serait la bonne réponse. 

Garfiel : “――――”

Il ouvrit et ferma la bouche.

Il respira, expira, inspira, respira de façon répétée.

Son rythme cardiaque était rapide. Ses yeux, hébétés. Il avait une douleur fulgurante à la tête et l’envie de vomir.

Le tourbillon d’émotions mélangées resserra sa poitrine, déjà au bord de l’effondrement.

――Mimi agrippa fermement sa main. 

Garfiel : “Mon incroyabl’ personne n’a…”

Garek : “――――”

Garfiel : “Rien à voir… avec votre femme.”

Voilà. Il l’avait dit, il l’avait dit à voix haute.

Avec cette phrase, le tourbillon dans le cœur de Garfiel se dissipa rapidement.

Il ne lui restait qu’un sentiment étouffant de perte. Garek, qui se tenait devant lui, baissa la tête comme s’il s’était trompé, ne voulant pas regarder Garfiel en face, parlant d’une voix tremblante.

Garek : “Je suis vraiment désolé…”

Avec une expression de douleur peu naturelle, il s’inclina. Cependant, Garfiel ne voulait pas voir la réaction de Garek. 

Assez. Il en avait déjà assez, ça suffisait. Il voulait partir, ne plus être blessé.

Qu’est-ce qui avait mal tourné ? À qui revenait la faute ? Était-ce sa faute ou celle de Garek ? Qui devait-il blâmer ? Qui devait-il écraser, qui devait-il manger, qui devait-il envoyer valdinguer ?

Que pouvait-il faire pour mettre fin à la douleur dans son cœur, pour l’effacer, la faire disparaître vers des contrées inconnues ?

??? : “Chéri… ! C’est génial, Gorgeous-san et Mimi sont toujours là.”

Garfiel : “――?!”

Ces mots résonnèrent avec un volume immense. Le chagrin et la tourmente amplifièrent le bruit, le rendant si intense qu’il pouvait tuer.

Pour Garfiel, en ce jour, son apparition était bien plus effrayante qu’un couteau. 

Garek : “Reala, pourquoi…”

Reala : “Vous êtes parti précipitamment, mais je ne voulais pas que vous rentriez chez vous les mains vides, alors…”

Alors que Garek était surpris par l’apparition de sa femme, Reala lui adressa un clin d’œil et passa à côté de lui. 

Puis elle s’approcha de Garfiel, stupéfait et raide, en lui tendant la main.

Reala : “Ce sont des sucreries sowaré que j’ai préparées. Même si ce n’est pas un grand signe de reconnaissance, j’en suis quand même fière. J’espère donc que vous l’accepterez.”

(Note de Traduction : Une fois de plus, la forme corrompue de “soirée” est utilisée ici, et encore une fois sans que cela ait beaucoup de sens. Compte tenu de la signification de ce mot, Reala semble donner une sorte de pâtisserie sucrée destinée à être consommée après le dîner.)

Garfiel : “…Ah.”

Son sourire ne contenait pas la moindre trace de malice. Garfiel refusa obstinément de parler. Son échange avec Garek avait rouvert de vieilles blessures, l’empêchant de parler à Reala.

Toute personne capable de lire l’ambiance comprendrait la signification de son silence. Et pourtant, 

Mimi : “Oh ! Un dessert, c’est tellement amusant ! Incroyable, je vais le partager avec la dame !”

Évidemment, Mimi sourit devant le sac de sucreries présenté par Reala, négligeant complètement l’ambiance. Garek avait l’air choqué, et Garfiel était sans voix. Mais, seule Reala riait de joie devant la réaction de Mimi.

Reala : “Je suis ravie que tu l’aimes, et je t’invite à le partager avec celle que tu appelles ta dame.”

Mimi : “D’accord, cumpris ! Comb… compris~ !”

Après avoir salué avec la main que ne tenait pas Garfiel, une main encore bleutée, Mimi rangea ce récipient dans sa poche et donna une tape dans le dos de Garfiel.

Elle avait appliqué suffisamment de puissance pour qu’il ne puisse s’empêcher d’avoir une quinte de toux, et Mimi sourit. 

Mimi : “Eh bien, cette fois-ci, nous partons vraiment ! Gorgeous Tiger et Gorgeous Mimi vous verront plus tard~ !”

Reala : “Très bien, bonne route. Attention à ne pas tomber dans l’eau, Gorgeous-san.”

Mimi prit la main de Garfiel et Reala les salua tandis qu’ils partaient.

En souriant, Mimi se retourna et fit un signe de la main, amenant Reala à faire de même encore plus vigoureusement. Après cet adieu souriant, seuls les deux hommes avaient gardé une expression douloureuse.

Garfiel : “…”

C’est ainsi que Mimi conduisit Garfiel le long du chemin jusqu’au bord de la voie navigable, en lui tirant le bras. Mimi n’adressa pas la parole à Garfiel, marchant jusqu’à ce que Reala ait disparu du champ de vision depuis longtemps.

Garfiel : “Hey, naine…”

Mimi : “Par ici~ !”

Garfiel : “――?!”

Garfiel voulut arrêter Mimi, mais il fut soudain interrompu.

Mimi, tenant toujours la main de Garfiel, sauta rapidement sur la pierre d’un immeuble de trois étages, montant à l’aide de supports. Garfiel était tiré, bien sûr, obligé de suivre le même rythme qu’elle. En quelques bonds, ils atteignirent le sommet du bâtiment.

Mimi : “Hmm ! Ça fait du bien~ !”

Garfiel : “Du bien, mon cul ! Qu’est-ce tu faisais, à l’instant…”

Alors que Mimi se baignait dans la brise, Garfiel se retourna pour confirmer son intention.

Toutefois, il vit que Mimi le fixait, le visage dépourvu de sourire. Il se voyait reflété dans ses yeux ronds, et Garfiel ne comprit pas le malaise qui couvait dans son cœur.

Face au silence de Garfiel, l’expression de Mimi se brisa soudainement. 

Mimi : “Garf, tu veux pleurer ?”

Garfiel : “Hein ? Qu’est-ce tu dis, pourquoi mon incroyabl’ personne pleurerait ?”

Mimi : “Je sais que Garf est fort, mais tu ne devrais pas jouer les fortes têtes. Reala, c’est la mère de Garf, pas vrai~ ?”

Garfiel : “――――”

À la question inattendue de Mimi, Garfiel retint son souffle.

Elle avait bien saisi le déroulement des choses. Si elle connaissait effectivement la situation de Garfiel, cette conclusion serait facile à établir. Cependant, Mimi ne savait rien de la famille de Garfiel. Sa capacité à discerner la vérité était vraiment impressionnante.

Le fait qu’elle ait abordé ce sujet horrifiant de manière aussi directe ébranla Garfiel, qui hésita.

Garfiel : “Qu’est-ce qui… te fait penser… ça… ?”

Mimi : “Garf et Reala ont une odeur suuuuuper similaire, et les deux enfants de Reala sentent aussi un peu Garf. C’est pour ça~.”

Son hypothèse n’était pas basée sur un raisonnement logique, mais sur quelque chose d’inné, elle pouvait donc voir la vérité clairement. Si Mimi avait déduit sa conclusion des paroles de Garfiel, il aurait pu tenter de cacher son passé. Mais dans ces conditions, Garfiel ne pouvait pas le nier.

Les jambes défaillantes, Garfiel observa le ciel, hébété.

Les étoiles et la lune n’avaient pas changé, et comme auparavant, elles regardaient Garfiel. 

Mimi : “Alors, c’est vrai ? Reala est la mère de Garf ?”

Garfiel : “…Mon incroyabl’ personne ne sait pas. Est-ce que cette femme est toujours la mère d’mon incroyabl’ personne ?”

Face aux paroles de Mimi, Garfiel se couvrit le visage avec sa main.

Il ne le savait pas. C’était vraiment, indubitablement, le sentiment qui tourbillonnait dans le cœur de Garfiel, en ce moment même.

Reala était indubitablement Reshia. Comme Garek l’avait dit, et comme ses actions jusqu’ici l’avaient démontré, Reala avait complètement oublié qu’elle était Reshia.

Oubliant tout, Reshia avait pris un nouveau départ en tant que Reala, élevant ses enfants et vivant heureuse. 

Garfiel : “Ah, à bien y réfléchir, ça ferait d’ces deux enfants le p’tit frère et la p’tite sœur d’mon incroyabl’ personne…”

Bien qu’il ne l’ait réalisé que maintenant, ces enfants, dont le père était différent du sien, lui étaient apparentés de la même manière qu’il était apparenté à Frédérica. En d’autres termes, ces enfants étaient son propre frère et sa propre sœur cadets. C’était une relation à laquelle il aspirait depuis son enfance, étant le plus jeune entre lui et Frédérica.

――Ne serait-il pas agréable qu’il puisse profiter de cette relation sans les circonstances qui l’entouraient ? 

Garfiel : “Même si j’lui parle d’mes origines, rien n’changera…”

Reala avait oublié l’époque où elle était Reshia.

Même si Garfiel révélait tout ce qu’il savait, les quinze années qu’elle avait passées en tant que Reala resteraient inchangées, et les quinze années environ qu’elle avait passées en tant que Reshia resteraient perdues.

Seulement, Reala aurait alors le fardeau de quinze années de culpabilité, avec le sentiment d’avoir perdu sa vie en tant que Reshia. Ce n’était pas nécessaire. Garek ne pourrait qu’assister à la dépression de sa femme, et leurs enfants ne pourraient qu’assister à la souffrance de leur mère, sans en connaître la cause.

Agir ainsi ne serait que dans l’intérêt de Garfiel.

Garfiel serait le seul à bénéficier du fait que Reala accepte qu’elle ait été Reshia. Ni Frédérica ni Lewes ne savaient que Reshia avait survécu. Si Garfiel ne disait rien, elles ne le sauraient jamais toutes les deux.

Les membres de la famille de Reala ne connaîtraient pas son passé sans le témoignage de Garfiel. S’ils l’apprenaient, ces moments heureux seraient probablement perdus plutôt que préservés.

Il suffisait que Garfiel cache tout, qu’il cache tous les sentiments qui s’accumulaient dans sa poitrine et qu’il se laisse aller pour que tout cela soit résolu avec succès.

Garfiel : “Pourquoi mon incroyabl’ personne…”

N’avait-il même pas le courage de le jeter, de l’oublier, de l’enfouir au plus profond de lui-même ?

Tigre… Tigre, où es-tu passé ? Montre-moi le bon chemin.

Lui seul pouvait tout supporter, tout affronter seul, et avoir encore la force de se relever.

Dis-moi, tigre… tigre. Un vrai tigre est l’être le plus fort qui soit, sans égal. 

Garfiel : “――――”

Il se tint la tête, mordit ses molaires, se lamenta sur les sentiments qui tourbillonnaient et se mélangeaient, puis Garfiel s’en aperçut.

Mimi : “Ça va aller…”

L’instant d’après, il s’aperçut que sa tête était doucement caressée, enlacée par une petite poitrine. 

Garfiel : “――――”

Toujours effondré sur le sol, Garfiel était saisi par Mimi de l’arrière dans un câlin.

Reposant son menton sur sa tête, sa petite paume caressait doucement la tête de Garfiel. Ce contact tendre sur son dos, dans un mouvement de va-et-vient, apaisait peu à peu la douleur et l’agitation de sa tête.

Garfiel : “Qu’est-ce que, qu’est-ce tu fais, c’est…”

Mimi : “Hmm, si Garf a besoin de pleurer, je crois qu’il y a un endroit spécifique où les garçons sont autorisés à pleurer ! J’ai oublié où, mais je me souviens que la dame m’en a parlé~ !”

Pendant un instant, elle semblait donner une réponse, mais le fil de ses pensées s’éloigna.

Pour que son cœur ne tremble pas, pour que sa voix ne tremble pas, Garfiel choisit ses mots avec soin.

Comme ceci, en soutenant Garfiel, Mimi gloussa.

Mimi : “Eh bien, bien que j’aie oublié, est-ce la sensation de la poitrine d’une femme ? Est-ce que c’est ça ? C’est ça ! Un homme peut pleurer sur la poitrine d’une femme qui l’intéresse !”

Garfiel : “…Qui s’rait intéressé par une naine comme toi.”

Celle qui intéressait Garfiel était une femme qui n’était jamais gentille quand il le voulait, mais quand il s’y attendait le moins, après quoi elle le frappait à coups de poing. C’était une femme incroyablement difficile à gérer.

La fille devant lui ne lui ressemblait pas du tout. Cependant, Mimi souriait toujours malgré la réponse de Garfiel.

Mimi : “Ce n’est pas grave ! Même si Garfiel n’est pas amoureux de Mimi, Mimi l’est déjà ! Hey, une fille qui aime Garf ! Du coup ! La poitrine de Mimi~ ! C’est normal de pleurer là~ !”

Garfiel : “――Ah.”

Quelle idée saugrenue. Qu’est-ce que c’était ? Une sorte de jeu de langage ? Ce n’était qu’une excuse d’enfant, chargée de rien d’autre que d’affirmation de soi.

Il n’y avait manifestement rien, alors arrête de plaisanter.

Tigre… Tigre, où es-tu passé ?

Dès maintenant, reviens dans mon cœur. Hurle ton rugissement profond et féroce, frappe ce dos voûté, force-moi à me réveiller, fais quelque chose à mes sentiments.

Sinon, sinon… Sinon, il sera trop tard. 

Garfiel : “Mère…”

Assez, assez, assez ! Arrête de parler. Ne prends pas une voix si faible. Ne pleure pas avec une voix si faible.

Il était un tigre, un tigre. Le plus puissant, le plus fort, le plus studieux. Le Plus Fort des Boucliers. Cependant,

Garfiel : “Mère… maman… maman… !!”

Mimi : “Bon garçon.”

Garfiel : “Pourquoi ! Pourquoi m’as-tu oublié ?! Je t’ai retrouvée après tout ce temps ! Mon incroyabl’ personne… ne peut même pas t’appeler maman ?!”

Mimi : “Tout va bien, Garfiel est un bon garçon, un bon garçon.”

Garfiel : “Maman… maman… maman… !”

Tigre… Tigre, où es-tu passé ?

De quoi ai-je l’air maintenant ? Étoiles, lune, ciel, dites-moi. 

De quoi ai-je l’air maintenant ?

Si je ne peux pas être un tigre rugissant, alors de quoi ai-je l’air en ce moment――?!

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Artiste du fan-art : HaruSabin

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-=Fin du Chapitre 30=-

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